8 ou io pieds. Souvent le roc vif encadre ces
enfoncements. Il en est qui s’éloignent de ce
que je viens de dire par leurs proportions; ce ne
sont plus de simples dépressions, mais des gouffres
profonds, inabordables, où la neige se conserve
pendant toute l’année.
Ces gouffres et ces enfoncements ménagés
entre les têtes des couches sont autant d’entonnoirs
ou l’eau s’engouffre dans les abîmes de la
montagne, jusqu’à ce qu’elle rencontre le schiste
qui l’arrête et la force à s’échapper par une
issue quelconque au pied de la montagne. La
plus abondante des sources est celle du Salghir,
qui n’est qu’une miniature de celle du Rhin ou
du Rhône : car comment le Tchatyrdagh, élevé
de 4,74° pieds, n’ayant presque pas de forêts
pour couvrir sa tête chenue, pourraît-il fixer
sur lui la fraîcheur et l’humidité?
Si la cime est nue, on ne peut pas en dire
autant des pentes orientales q u i, surtout dès
que le schiste paraît, sont parées d’une riche
verdure de charmes, de frênes, de hêtres, etc.
Point de conifères. Cette végétation se hasarde
quelquefois jusque sur le bord de la table, où
j ’ai vu, dans les fentes du roc, de beaux hêtres
qui semblaient braver en hardiesse les arbousiers
qui se montrent sur les rochers les plus
inabordables.
Notre sentier nous mena longtemps le long
de l’escarpement oriental; l’adresse des chevaux
est incroyable au milieu des pierres, si près du
bord du pi’écipice. Mais la vue superbe dont on
jouit de si haut distrait ; elle plane à vue d’oiseau
sur le vallon de l’Angar, au fond duquel on voit
serpenter le chemin d’Aloucheta, au milieu des
collines boisées.
Mais si cette vue est enchanteresse, que dirai-
je de celle que l’on a de l’extrémité orientale du
Tchatyrdagh ? En effet, après la table uniforme,
on arrive tout à coup au pied d’un surgissement
des couches qui, en s’élevant de 6 à 700 pieds au-
dessus du plateau inférieur, forment cette partie
de la montagne qui lui a fait donner le nom ancien
de Trapezus, et chez les modernes celui de
Tchatyr-clagh (montagne de la tente). Sa forme
en effet est celle d’une longue tente qui prendrait
tout le large de la montagne. La pente en est
moins escarpée du côté de la table où les couches
ascendent : mais elle est presque à pic du côté
d’Aloucheta, où se présentent les têtes des couches;
le sommet est en dos d’âne. Il faut se
placer sur cette crête pour jouir de la vue la
plus étendue et la plus intéressante : elle ne
change pas pour les objets les plus éloignés,
qu’on se place sur la pointe orientale ou sur
l’occidentale. ’ *
Ce qui me frappe le plus, c’est de voir autour
de moi, à mes pieds, l’immense labyrinthe de