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comme une ile et les profondes vallées qui le
séparent des deux longs tronçons de la chaîne
Tauriquès. Mais on n’a vu que la moindre partie
des agents plutoniens, et en jetant les yeux vers
1 ouest, au départ d’Aloucheta, on a bientôt jugé
de l’ensemble du phénomène, à l’aspect de la
Babougan-yaïla, la rivale du Tchatyrdagh, s’appuyant
si haut sur les dômes d’ophitone du
Bïouk-Ouraga et duKastèle qui sort sa tête arrondie
du milieu des schistes qui bordent le rivage.
La vue géologique que j ’en donne (1) n’a
pas besoin de long commentaire.
Deux chemins ici laissent aujourd’hui le voyageur
dans l’embarras du choix. La nouvelle
chaussée se dessinant au milieu des ruines de
l’ancien Aloucheta, sur les collines schisteuses,
s’élève assez pour doubler commodément le col
qui joint le Kastèle au Koutchouk-Ouraga. Elle
est remarquable par la beauté des points de vue ;
on plane sans cesse sur le beau golfe marqué
entre le Méganome et l’Aïoudagh, dont l’enceinte
est digne du pinceau d’un habile peintre. L’ancienne
route cotoyait d’abord le rivage de la
mer, jusqu’au pied du Kastèle, où cessait toute
possibilité de se frayer plus loin un passage,
si ce n’est en montant jusqu’à mi-côte de la
montagne, où la nature avait ménagé une étroite
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terrasse, taillée dans les flancs du Kastèle. Telle
est la première route que j ’ai faite, et c’est en la
suivant que je continuerai ma narration.
La vue de Kastèle, au premier moment, frappe
par ses formes extraordinaires ; jusqu’à présent
je n’avais rien vu de pareil en Crimée. Il a l’air
d’un dôme aplati, présentant sa tête et son plus
fort escarpement en face de la mer. A l’extrémité
opposée ses flancs s’abaissent et prennent une
courbure plus radoucie, comme opprimés par
les masses schisteuses qui pèsent dessus. Je
donne ces détails avec intention.
Dans tout spn pourtour, la roche est à nu, et
les contreforts de schiste qui s’appuient dessus
vers Aloucheta et vers Karabagh, ne montent
qu’à mi-côte. Le Kastèle entier est un granité
ophitone très-pur, homogène, bleuâtre, parsemé
de cubes de fer sulfuré ; tel il paraît à sa cime
dénudée, présentant des traces jaunes et rouges
de décomposition. Là, il est par plaques verticales
et se casse par cubes ou parallélipipèdes ; la
cassure est plate , quelquefois écailleuse : on
trouve des plaques d’ophitone qui n’ont que 2 à
3 pouces d’épaisseur et qui sont entassées les
unes sur les autres. Quelques lits sont composés
d’ophitone globuleux ou à faces sphériques concentriques.
Chaque boule a de 2 à 3 pieds de
diamètre, et consiste en enveloppes régulières
appliquées à l’infini les unes sur les autres, ayant