A coté des statues se trouvait le socle qui la
portait ; il est du même grès, et les injures du
temps n’ont pu y effacer une des plus belles et
des plus intéressantes inscriptions du Bosphore.
Je 1 ai déjà rapportée lorsqu’il était question des
A s Mêotes dont cette inscription fait aussi mention
(1).
Elle date, comme celle de Diane Agrotère, du
roi Pairisades I , et nous apprend que sa femme
Komosarye, fille de Gorghippe, pour s’acquitter
d un voeu qu’elle avait fait, avait élevé ce monument
aux puissantes divinités Anerghe et
Astara.
Anerge est le feu sacré, le feu du ciel ou des
enfers, le tonnerre. Ner est la racine chuléenne
(anciens Mèdes et Persans) pour feu. Ner gai,
Nergil en chutéen ou persan sont les hauts lieux
ou l’on adorait le feu (2). Christ donna à Jacques
et a Jean, fils de Zébédée, le surnom de
Boanerges, c’est—a-dire, fils du tonnerre (3).
(1) Voy. Foy. t. IV, p. 384.
(2) IIe liv r e des Rois, ch. 17, v. 3o. Cogmp. l’abbé
Arri, i° Lettre à M. Quatre-Mèresur une inscription latino-
phénicienne; 20 Essai philologique et historique sur les
temples du feu, etc. Annales de philos, chrét. n° 79, t. XIV
p. 27 ; 3° Lettre de Jean-Antoine Arri au chevalier Della-
Marmora , sur les Nur-hag de la Sardaigne, en italien.
Turin, i 835. C. Ritter, Forhalle, etc. p. 217.
(3) Ev. selon StMarc, ch. 3. v. 17.
Astara par contre est la même que X A star té
des Syriens et des Phéniciens, YAthor des Egyptiens.
C’est la Vénus Uranie, la Vénus nocturne,
la Vénus syrienne , cananéenne , arménienne ,
en un mot la Vénus orientale qui présidait aux
mystères de la nuit, de la création et des
régions infernales, le grand laboratoire des merveilles
de la nature : c’est aussi la lune d’avril,
la lune productive. L’étymologie de Astara vient
à&Astar et Star qui, dans les langues orientales,
a signifié un astre, une étoile quelconque (1).
Ainsi, Komosarye avait consacré un monument
au Feu sacré et à la Uénus Uranie, qui présidait
à la nuit, aux enfers. Cette singulière consécration
me fait penser que c’est à la suite de
quelque éruption volcanique effrayante, que
cette fille d’un roi des Sindes, empruntant à la
mythologie orientale des Méotes-Mèdes ses divinités,
fit ériger ce monument expiatoire pour
apaiser les divinités infernales. Placé’ sur le
sommet aplati du cap Rakhmanofskoï qui fermait
au S. la baie de Képos, sur le point le plus
apparent de la côte, il pouvait être vu et salué
par tous les navigateurs du Kouban, soit èn se
rendant à Phanagorie , soit en en revenant.
(i) C. Ritter, Forhalle, p. 64- Le Court de Gébelin,
Monde primitify t. 1, 95. Sur un fragment de Sanchonia-
lon. Dict. des Ant. dans l’Encyc. art. Athor, etc.