collines et de contréforts, bas, arrondis ou
coniques, presque tous boisés, d'un beau vert
frais, qui remplissent la longue combe ignée que
bordent, d’un côté, le haut crêt jurassique, seuH-
blable à un mur de marbre, et de l’autre, les falaises
de la craie, du calcaire à nummulites et du
tertiaire. Ces falaises que l’on voit commencer
derrière Karassoubazar avec une régularité
étonnante, se prolongent uniformément sur une
ligue qui paraît semi-circulaire, comme un bou-
levart blanc, sans interruption jusqu’à Sévas-
topol, où elles plongent sous la mer.
Cette ligne blanche que surmonte Tchoufout-
K a lé , coupe singulièrement le paysage, et sert
de démarcation à la steppe qui recule, dans son
effrayante monotonie, derrière cette forte barrière.
Quelques points s’aperçoivent çà et là
sur cet océan terrestre, et au bout d’un long
contour que fait la mer azurée, on dejine même
K o z lof dans son désert. A l’est, l’oeil.soupçonne
aussi les rives ténébreuses ou vaporeuses du
Sivaçhe : ce n’est pas la belle partie de la Crimée.
Mais retournons dans le beau labyrinthe de
verdure qu’alimente la fraîcheur du schiste et
du grès. C’est là que l’oeil se perd au milieu de
tous les défilés des montagnes ;*mais il s’attache
surtout au fil moins embrouillé des vallons du
Belbek et de la Katche, qui, comme de grandes
branches munies de nombreux rameaux , coupent
ce vaste tapis vert.
La vallée du Salghir et celle de l'Aima, la
première à droite, la seconde à gauche, rivalisent
par un contraste surprenant. Plus le Salghir
s’enorgueillit de voir que sur ses deux rives
l’homme ait laissé à peine une place sans s’y
créer une habitation , plus l’Alma se plaît à
conserver ses ondes vierges loin du bruit
des hommes, à les cacher sous d’épais ombrages.
Sur le Salghir, des jardins innombrables encadrent
une foule de villages aux huttes chétives,
il est vrai ; mais Simféropol dans le lointain, en
fermant la vallée, paraît avec quelque pompe, et
son dôme blanc sur l’horizon de la steppe rappelle
celui de St-Pierre sur la campagne romaine.
Sur l’Alma , au contraire, à peine de la
pointe occidentale du Tchatyrdagh qui penche
sur la vallée, entrevoit-on briller l’onde sur les
roches schisteuses. Un prêtre dont j ’ignore le
nom, est le seul qui ait tenté de faire un établissement
dans ces solitudes. Sur les bords de la
rivière jaillit une fontaine appelée Saulouk-Soa
(eau de santé); on lui attribue de grandes vertus
curatives. Le troisième jour des fêtes de Pâques
on s’y rend de Baktchisaraï, de Simféropol et
des lieux avoisinants en partie de plaisir. Ce
prêtre a voulu profiter de cette vogue pour y