pics à polypiers, il me prit fantaisie de descendre
vers le rivage pour en scruter les hautes falaises.
Déjà je n’avais plus que quelques pas à faire
pour arriver au bord du talus, lorsque mes yeux
furent fascinés par un spectacle fantastique : la
hauteur de la falaise me l’avait caché jusqu’alors.
Sur le long rivage du Bosphore s’ébattait une
telle multitude de cygnes, que la mer en était
blanche jusqu’à une grande distance. En se débattant
ils poussaient un Cri sonore, fortement
accentué et légèrement modulé; je ne sais si
c’est ce que je dois appeler le chant du cygne.
Jamais je n’avais rien entendu de pareil, et cette
mélodie lointaine servait de complément à ce
magique spectacle.
Je restai comme pétrifié à cette vue, et les
cygnes un instant ne parurent pas m’apercevoir.
Mais tout à coup, comme si l’un d’eux leur eût
donné l’éveil, je les vis se précipiter loin du rivage,
et bientôt toute la longue bande blanche,
ayant regagné le large, conlitua ses jeux, pendant
qu’une autre scène me mit dans une
étrange perplexite.
Quatre chasseurs cosaques qui étaient aux
aguets pour tirer sur les cygnes, sortent de
leurs embuscades, et furieux courent sur moi,
pour se venger d’avoir dérangé leur chasse et
épouvanté les cygnes. Aux injures succèdent
les menaces, et lorsque je viens d échapper a
l’un d’eux qui me poursuit, un autre se présente
devant moi et va m’assommer de la crosse de
son fusil qu’il a déjà leve sur moi. Mais avec la
promptitude de l’éclair, je lui oppose mon grand
marteau de géologue, que je tenais caché sous
mon ihanteau. A la vue de cette arme inattendue,
et de forme passablement pointue, mon
cosaque recule, hésite* et je m’échappe pendant
que ses camarades* qui cherchaient à m’atteindre,
accourent à lui;
Il paraît que mon marteau fit son effet : ils
me laissèrent aller en paix; mais aussi je ne mis
pas beaucoup de temps à m’éloigner de ces
pointilleux chasseurs.
En m’approchant de Taman le long du rivage,
je vis les canards sauvages former une autre
bande noire sur la mer, longue de plus d’une
verst : le tour du bec blanc, paraissait seul
comme des points brillants sur cette surface.
Les oiseauxde passage, cygnes, oies, canards,
paraissent avoir fait du Bosphore une de leurs
grandes stations pendant le mois d’octobre,
jusqu’à ce que les frimais les chassent plus loin.
Bougaze. — Stébliefska.
Celui qui aura le temps de faire une excursion
jusqu’à Bougaze, ne perdra pas sa peine, et