raient ou s’il suivrait la tendance des autres vins
de la côte.
En résumé, tout ceci prouve que les vins de
la côte de Crimée sont encore dans une époque
de transition et ne peuvent avoir de réputation
stable, qui ne se dessinera qu’au bout d’un certain
nombre d’années. Alors seulement on
pourra parler des vins de Crimée, et ils pourront,
par des qualités qu’ils auront à eux , soutenir
une réputation méritée et lutter contre
d autres réputations qu’ils parviendront peut-
être à balancer. Ce sera sans doute un milieu
entre les vins fins du nord et les gros vins spiritueux
du midi. Mais la Crimée jouit de tant
d espèces de climats, de sols, d’expositions, que
je ne doute pas que si l’on ne peut obtenir des
terres fortes de la côte de Crimée les qualités
de vins fins que l’on en attendait, l’on né puisse
les obtenir autre part. Je ne citerai qu’un
exemple.
Ce n est pas une expérience de quelques années
qui a appris que le sol et le climat de la Cher-
sonesehéracloétique étaient aussi favorables à la
culture de la vigne que ceux de la eôte de Crimée;
car déjà dans l’antiquité,quatre siècles avant notre
ere, cette péninsule avait des vignobles, des caves
et des amphores. D’ailleurs, cela est prouvé par
une inscription trouvée en 1794 dans les ruines
de Cherson, et où le peuple entre autres vole
une couronne de lierre à Agaziklêktê, quia fa it
fleurir la culture de la vigne dans la campagne
(1). Cette culture était une branche de
l’économie et du commerce des Chersonésiens.
M. Bardac, capitaine du port de Sévastopol
en i 8o3, a ramené avec succès la vigne sur un
sol où les troupeaux de moutons et de chèvres
des Tatares l’avaient extirpée. Il a planté comme
essai près de Sévastopol, sur les pentes d’un
ravin qui s’ouvre à l’extrémité de la baie du sud,
un petit vignoble dont il a fait venir les plants
de Smyrne ; d’heureux résultats ont encouragé
d’autres particuliers, entre autres M. Tcher—
niafski, et en i 834, MM. Bardac fils et Tcher-
niafski récoltaient un vin rôuge qui ne le cédait
en rien ni pour la qualité, ni pour le goût, ni
pour la couleur à aucun vin rouge du reste de
la Crimée, sans exception. Je ne ferai pas valoir
ma propre expérience, qui pourrait être suspectée
; mais j’en appellerai au témoignage de connaisseurs
qui n’étaient rien moins qu’intéressés
à dire du bien de ce vin , à celui de M. le baron
Berckheim, qui passait pour avoir les meilleures
qualités de vins de la Crimée, et qui, après avoir
(1) Recueil de quelques antiquités trouvées sur les bords
de la Mer-Noire, par Léon de W axel, n° 4- Clarke,
Voyage, etc., p. 117; Elle est aujourd’hui au musée de
Nicolaïef.