que mon courrier avait été volé sur la route par
des gens du pays, qu’on avait décacheté les
lettres, et que, ne pouvant ïes lire, on les avait
déchirées. Durant notre séjour ici , nous ne
fûmes pas sans éprouver de vives inquiétudes
sur notre sort. Le mélik Nimir, en faisant sa
soumission au pacha, n’avait pu. garantir celie
de ses sujets. Cependant ces hommes dissimulés
et perfides tramaient dans l’ombre un complot
contre nous et contre Divan Effendy, q u i, depuis
p eu , était à Chendy. Ne soupçonnant point
le danger qui nous menaçait, nous vivions dans
une sécurité parfaite.
Le 2 mai ; ayant passé tout le jour aux ta-
râbyls, j’appris à mon retour que, dans la journée,
cinq hommes de la suite de Nimir étaient
venus chez nos voisins s’informer de notre
nombre, de celui de mes chameaux, de mes
dromadaires : deux étaient entrés dans ma tente,
et avaient examiné attentivement ce quelle renfermait.
Je crus d’abord ne devoir tirer aucune
conséquence de cette inspection, qui me parut
seulement l’effet de la curiosité, que l’on excite
à moins chez les Arabes*
Le 4, le cheykh du village de Djébel, nommé
Faqyr el-Omar el-Qassyr, vint avec une suite
de cinq hommes ; if me pria d’accepter un
mouton que ses gens m’apportaient de son village.
Je l’amusai beaucoup avec des allumettes
oxigénées; cette manière de se procurer du feu
produisit sur .son esprit l’eifet accoutumé. Je lui
fis cadeau d’un de ces petits appareils; et dès-
lors, nous nous liâmes de plus en plus d’amitié.
Jetais avec ce brave homme, lorqu’un voisin
vint me prévenir qu’une conspiration se tramait
contre nous et contre Divan Effendy; que nous
devions être, ainsi que lu i, arrêtés; le même
jour. Cet avertissement me surprit beaucoup:
il n’en fut pas de même du cheykh; il me dit
qu’il avait connaissance des intentions malveillantes
des.soldats de Nimir. C’était, ajouta-t-il,
pour nous offrir un asyle dans sa maison qu’il
était venu. Il nous engagea à n’avoir aucune
crainte ; et promit que, lorsqu’il en serait temps,
il viendrait lui-même, avec du monde, à toute
heure du jour ou de la nuit, nous etfimener
pour nous placer sous sa sauve-garde. ¡Bon air
exprimait la franchisé et la cordialité. II avait
tellement gagné ma confiance, que j’aurais.mis
sans hésitation mon sort entre les mains de ce
vénérable cheykh. Mais les choses n’en vinrent
pas là. Le lendemain o , on aperçut sur le Nil
II. 12