ration des ruines de Barkal. A’bdin bey s’empressa
de m’envoyer une tente, et me témoigna
beaucoup d’égards. Cet excellent homme est
vraiment un ami précieux pour les Européens.
Ses nobles procédés, ses manières affables, l’ont
fait chérir des voyageurs qui font connu ; tous
ont dû s’étonner qu’un Turc ait acquis en Egypte
cette amabilité qui le ferait distinguer même
dans lès pays les mieux civilisés de l’Europe.
Le lendemain 11, sur l’extrême désir que je
témoignais de visiter les pyramides de Nouri,
que j’avais découvertes dans le lointain lors de
mon apparition au milieu des ruines du mont
Barkal, A’bdin bey nous fît donner deux soldats
pour nous y conduire, mon interprète et moi,
et un cheval à chacun. Étant parti tard, j’eus à
peine, ce jour-Ià, le temps de jeter un coup-
d’oeil sur ces monumens, qui diffèrent peu des
moyennes pyramides de Saqarah. A ma rentrée
au camp, je vis bientôt arriver M. Letorzec avéc
tout notre bagage.
Des Grecs et d’autres Européens, courtisans
du prince, auxquels j’étais redevable des fatigues
et des frais du voyage de cinq cents lieues que
je venais de faire en pure perte, accoururent
d’un air empressé me complimenter sur mon
heureux retour; tous m’offraient leurs bons offices
auprès du prince, et cherchaient à faire
paraître une satisfaction qu’ils étaient loin de ressentir.
Au reste, ils croyaient bien être arrivés
à leurs fins : ces ruines de Barkal, dans leur opinion,
étaient incontestablement celles de 1 antique
Méroé, cherchées si long-temps et si vainement
jusqu’à eux. Il était impossible que je
ne lusse pas leur triomphe dans leurs yeux ;
mais ce triomphe était-il bien réel? Aucun n’avait
pris ni mesures ni dessins de ces monumens;
nulle observation astronomique n’avait été faite
par eux : leur plus grand travail s’était borné à
tronquer quelques hiéroglyphes pour y attacher
leurs noms. Dans le nombre de ces hommes, il
s’en trouvait cependant, je dois le déclarer,
J e fort* estimables; je citerai en première ligne
M. Rossignol, médecin piémontais , qui eut lui-
même beaucoup à souffrir de leurs mauvais procédés
: un de ses compatriotes ayant péri au
milieu d’horribles convulsions, on n’hésita point
à attribuer sa mort à un empoisonnement, et
à en accuser ces courtisans aussi pervers qu’envieux.
Ismâyl lui-même, quel que fût l’empire
que ces étrangers exerçaient sur son esprit, était
loin de leur accorder une confiance aveugle •
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