VOYAGE À MÉROÉ,
que les troupes resteraient dans Sennâr, et que
les malades seraient campes près du fleuve ,
hors de la ville, au nord, afin qu’ils pussent y
ressentir les effets Salutaires du vent qui souffle
dans cette direction.
Je témoignai de nouveau au prince le désir
que j’avais d explorer le fleuve Blanc : je lui dis
que, s il ne se proposait pas d’y aller lui-méme,
je le prierais de me permettre d’accompagner
son frère Ibrahym. Les promesses coûtent peu
aux Turcs ; Ismâyl ne manqua pas de m’en faire
beaucoup . il me parla de l’or que nous devions
trouver en abondance ; de l’intention où il était
de me confier la direction des travaux pour
1 extraction de ce métal. S’apercevant que cette
brillante perspective n’avait pas tout-à-fait pour
moi les charmes de la réalité, il m’offrit, pour le
Fâzoql, une cange armée, dans laquelle je pourrais
remonter le fleuve Bleu aussi haut que je
le voudrais. II me donna l’assurance que plus
tard nous en ferions de même sur le fleuve
Blanc ; que je pouvais y compter d’autant plus,
que ce voyage rentrait dans son plan d’opérations
, qui avait pour but principal la recherche
des nègres. Comptant sur cette dernière promesse,
je me décidai à le suivre.
Les préparatifs du départ occupaient toute
l’armée. L’expérience m’avait appris que je manquerais
de moyens de transport ; je fis donc
chez le qâdy le dépôt de plusieurs caisses de
minéraux, de coquilles, d’instrumens dont je
pouvais me passer ; j’y renfermai, en cas d événement,,
un double de nos observations astronomiques.
L’expédition dlsmayl était forte de
quinze cents hommes ; il avait avec lui le Chaykyé
Chaouss, et les méliks Dourar des pays au nord
du Fâzoql. L’armée d’Ibrahym était de douze
cents hommes; il avait aussi divers cheykhs et
méliks du pays, entre autres 1 ancien roi Bady,
pour lui fournir des guides et des instructions
sur sa route. II devait rester à Sennâr quinze
cents hommes environ, dont la moitié était
encore malade.
• Le 5 décembre, Ibrahym se mit en marche
avec ses troupes, et suivit le fleuve encore
quelques jours avant d entrer dans I intérieur,
d’où il devait se rendre à Dinka, province riveraine
du fleuve Blanc. J ’étais toujours dans
l’embarras pour trouver des domestiques : quelques
habitans du pays m’avaient donné leur
parole de venir avec moi; ils me renouvelèrent
cette promesse jusqu’au jour du départ; et ce