paraître à nos yeux sous une faee avantageuse.
Quoi qu’il en soit, les habitans du Barbar ont
une physionomie ouverte et franche ; iis ne sont
ni timides, ni craintifs; j’étais surpris de les
voir communiquer familièrement avec les soldats
turcs. Dans ïe Barabrah et la haute Egypte,
il n’est point d’Arabe qui ne tremble, point de
femme qui ne se couvre la figure et ne fuie à
toutes jambes, à la vue d’un Osmanli. Ic i, au
contraire, les Turcs allaient et venaient dans les
maisons, et y étaient bien reçus. Une femme,
accostée par un soldat, s’arrêtait sans crainte
sur le chemin pour lui parler. Lorsque je me
rendais à el-Mekheyr, sous prétexte d’acheter
des provisions ou pour y boire du lait, j’entrais
dans un bon nombre de maisons pour converser
avec les habitans : tous m’accueillaient avec bienveillance
; il fallait s’asseoir et boire la méryse.
Rarement j’y rencontrais des hommes : au reste,
je ne les crois pas jaloux. II m’arrivait souvent
de me trouver au milieu de cinq ou six belles
personnes dont aucun voile importun ne dérobait
les appas à mes regards. La nudité, à ce
qu’il paraît, n’offense point ici la pudeur. Cependant
, à ma première visite de ce genre, l’air
empressé de ces dames, leurs manières libres,
me firent penser que le hasard m’avait conduit
dans un lieu suspect, et la prudençe me conseilla
de fuir. Mais ensuite, recevant par-tout le
même accueil, par-tout remarquant les belles
d’el-Mekheyr parées, dans leur intérieur, des
attraits tels quels que fa nature leur a départis,
je dus en conclure que c’était letat des moeurs
nationales Ces moeurs sont-elles un indice d innocence
ou de dépravation? c’est ce que je ne
saurais dire. Toujours offraient-elles à mes yeux
un contraste bien frappant avec celles des femmes
égyptiennes! Au reste, c’était pour la première
fois que des Turcs apparaissaient dans le pays,
et on ne les Connaissait pas encore. Pour plus
de commodité, j’avais endosse dans les premiers
jours le costume de Bédouin ; mais je m empressai
de le quitter, dès que j’eus appris que
les gens de cette nation avaient déjà confirmé
ici leur réputation bien méritée de pillards.
La nourriture des Barbars ne diffère point de
celle des habitans du nord. L aisance dont ils
jouissent leur permet de manger plus souvent de
la viande de boucherie, c est-à-dire, de chameau,
de boeuf, de mouton, quoiqu’elle soit chère : ils
font un grand usage de lait aigri, de feuilles de
pâte faites avec la farine de dourah mêlée par