blaient les avoir alarmés. Ce groupe de montagnes
se nomme A’qâdy ; le sommet de la plus
considérable, au sud, est occupé par un village
assez grand; elle est en partie couverte de verdure.
Un second village est construit au nord
sur la pente dune colline ùioins bien boisée. Six
autres éminences avoisinent celles-ci ; toutes sont
entrecoupées par de petits vallons où croissent
des baobabs, des tamariniers, des nebkas et
autres arbres , et s’élèvent en amphithéâtre. La
hauteur de leurs points culminans peut être de
quatre à cinq cents pieds. L’ensemble et les
détails de ce groupe ont quelque chose de pittoresque
qui flatte et intéresse d’autant plus le
voyageur étranger , que nulle part ailleurs rien
de semblable ne s’offrit à ses regards : j’aimais
à contempler ces blocs de granit arrondis et
superposés qui saillent de distance en distance ;
cette foule de maisonnettes de forme circulaire
ombragées par de grands et vigouréux végétaux.
Je dessinai plusieurs vues de ces sites vraiment
romantiques. Dans la nuit, une partie des ha-
bitans, les hommes sur-tout, prirent la fuite.
Ismâyl, mal informé, avait cru d’abord que ces
villages étaient peuplés de musulmans: il y
envoya le melik ■ Ghâouss , accompagne de
plusieurs personnes, pour en sommer les ha-
bitans de se rendre et de payer un tribut en
dourah et en bestiaux. Ils s y refusèrent, et
répondirent qu’ils n’avaient rien de plus qü il ne
fallait pour leur existence ; que le pacha pourrait
faire d’eux ce qu’il désirerait. Au retour précipité
deChaouss, les troupes , ayant appris quelles
avaient affaire à des nègres idolâtres, ne demandèrent
qu’à fondre sur les habitations de
ces pauvres gens: les ordres en furent donnés.
Trois cents hommes montèrent au village du
nord, qui, en un instant, devint le théâtre de
l’incendie, du pillage et de toutes les horreurs
dont est capable une milice étrangère à tout
sentiment généreux et humain. Leurs malheureux
adversaires ne pouvaient opposer aucune
résistance : ils n’en furent pas moins traités
comme si leur village eût été pris d’assaut.
Cent soixante-dix furent faits prisonniers, et
conduits, avec des fourches de bois qu’on leur
attachait au cou ( voÿ. vol. I , pl. III), devant la
tente du pacha. La plupart étaient des femmes,
presque toutes vieilles : en vain suppliaient-elles
les Turcs de leur rendre la liberté ; elles eussent
aussi facilement attendri des tigres affamés.
Rien n’échappa au penchant destructeur et à