formant une multitude de petits canaux sinueux.
L’oeii attristé ne découvre sur cette sombre
plage aucun indice de végétation : ces roches *
dont les crêtes noirâtres contrastent avec la
blancheur de l’onde écumeuse qui les frappe ;
ce sol aride et décharné; ces vastes et sauvages
solitudes, où semble régner un éternel silence ;
tout en ce lieu concourt pour faire pénétrer dans
famé un sentiment de mélancolie mêlé d’admi-
ration.
Bientôt une petite île vint délasser notre vue
par quelques traces de verdure. Durant une
lieue, nous suivîmes une route tortueuse; de
loin à loin, de petits carrés de terre et des cabanes
désertes nous firent présumer l’existenCe
de quelques malheureux sur ces bords agrestes :
le limon que le fleuve y dépose tous les ans
entre les rochers, fertilisé par eux, la laine et
le lait de leurs brebis, suffisent à tous leurs
besoins.
Enfin le Nil redevient navigable : deux rochers
élevés qui l’encaissent, lui livrent ici un passage
de trois à quatre cents pas. Sur le sommet de ces
rochers, on aperçoit les ruines de deux anciennes
forteresses : leurs murailles , bien construites ,
sont en pierres froides et brutes.
A onze heures, nous reconnûmes les traces
des équipages de l’artillerie : elles nous servirent
d’indication pour rejoindre l’armée, et nous l’atteignîmes
à midi. Nous nous trouvions de nouveau
près du fleuve, qui, là encore, est couvert
de rochers. Il y végète quelques acacias. A peu
de distance, gît l’île de Kandi, d’une étendue
assez considérable, mais presque entièrement inculte.
Nous rencontrions quelques acacias épars,
A droite, notre vue était bornée par des roches
d’un granit en générai composé de feld-spath
blanc e t de nombreuses parcelles de. mica blanc
nacré. Ismâyl m’en envoya un morceau par son
médecin, pour me demander si ce n’était pas de
I argent. II avait été tellement question de mines
d argent et d o r, que les soldats eux-mèmes ne
faisaient qu’y rêver. Les mineurs du pacha affirmaient
que la ressemblance de cette substance
avec l’un des deux métaux qui exercent tant
d’empire sur les hommes, ne manquerait pas de
nous conduire à la découverte de mines puissamment
riches : ce mica, suivant ces doctes
métallurgistes, n’était rien autre chose que de
l’argent qui n’avait pas encore atteint à sa maturité.
A une heure, nous étions au-delà de l’Ile de