les maisons en terre sont petites, carrées, et
toutes isolées les unes des autres. A égale distance
de là, nous vîmes celui de la Tounice,
pareil au précédent, et, à une demi-lieue plus
loin, Deqqet-Ouâd-D joudallah, bourgade assez
grande. Nous marchions à un quart de lieue du
Nil. A sept heures, on traversa un petit bois
d’acacias, peuplé d’une multitude de petits
oiseaux rougeâtres et d’un beau vert. On s’approchait
d’un des chefs-lieux du Barbar : le
prince, pour en imposer aux habitans, en étalant
tonte la grandeur et la magnificence de son
armée, voulut se présenter à leurs yeux en ordre
de bataille. La cavalerie et l’artillerie précédaient :
les chefs; couverts de vêtemens où l’or resplendissait
, faisaient caracoler leurs chevaux et couraient
en avant : venaient ensuite les Osmanlis,
les Bédouins, les Mohgrebins, les Abâbdehs,
les chameaux et les ânes. La bigarrure des costumes
et des harnachemens, ces soldats chargés
d’armes différentes, embarrassés de petits violons,
du sac à tabac , d’une longue pipe qu’ils
soignent autant que leur fusil ; le clinquant de
leurs habits et leurs sabres étincelans, qui
éblouissaient en réfléchissant les rayons du
soleil ; tout cela produisait un effet non moins
bizarre que pittoresque. Cependant, cette armée
dont l’aspect eût fait rire quiconque connaît la
tenue des troupes européennes, plongea les
habitans de Barbar dans l’étonnement et l’admiration.
Le mélik Nâsèr-A’dyn, les cheykhs, les
faqyrs et les principales autorités vinrent à la
rencontre d’Ismâyl pacha, Je féliciter de ses
succès sur les Chaykyés, et se soumettre au
joug de celui qu’ils appelaient leur libérateur.
Après, cinq heures de marche, on arriva à
Qoubouchi, grand village sur la plaine déserte,
à un quart de lieue du fleuve, près duquel le camp
fut établi : en face était el-Mekheyr, chef-lieu de
la province, et où réside le mélik Nâser-A’dyn,
gouverneur du pays. Pour que l’armée pût continuer
sa route, il fallait se procurer ici un grând
nombre de chameaux de transport, ce qui devait
nécessiter des expéditions chez les Arabes des
déserts d’alentour. La prise de possession de la
province et l’organisation à y établir, les relations
à ouvrir avec la province de Chendy, tout
obligeait Farinée de faire ici un long séjour; et
cette circonstance semblait m’être peu favorable
puisque ce pays avait déjà été observé par un
voyageur, et ce voyageur était Burckhardt. Je
ne saurais citer le nom de ce savant sans lui offrir
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