de quatre* heures. Deux troncs d’arbres creusés
et accouplés ensemble avec des liens, quelques
solives assèmbïées de la même manière pour former
les bords, telle était notre embarcation.
Mais quelle qu’elle fût * nous eûmes à en disputer
chaùdement l’usage. Une troupe de gens,
à la vue du bateau, étaient accourus, et prétendaient
s’y embarquer avant que nous eussions
achevé notre passage. On en vint aux mains
avec mes domestiques : des sabres étaient levés
d’un côté, des fusils mis en joue de l’autre. J ’arrivai
à temps pour mettre le hola : il y avait eu
quelques coups de bâton donnés ou reçus ; mais
les miens restèrent maîtres du champ de bataille.
Ici déjà on respectait fort peu les lettres du pacha
et ceux qui en étaient porteurs.
Arrivés de l’autre côté du Nil , nous nous
trouvâmes à ei-Bâqeyr. Selon le témoignage
d’anciens1 auteurs et celui du célèbre d’Anville,
cette terre que nous foulions était la presqu’île
de Méroé, déjà parcourue sans fruit par deux célèbres
voyageurs : notre latitude d’estime était de
17° 20'; nous avions doné dépassé de vingt lieues
environ la position que d’Anville assigne à Méroé.
Pendant qu’on chargeait les chameaux, je
réfléchissais en silence, bien indécis sur la routé
que je devais prendre. Je montai sur des terres
élevées d’où la.vue embrassait d’immenses plaines,
et je cherchais sur tous les points de 1 horizon
quelques vestiges de Méroé, quelque sentier
où je pusse m’engager avec la moindre
lueur d’espérance : mes yeuX se fatiguaient en
vain. Cette M é r o é , pensais-je, , n’a-t-elle donc
laissé aucune trace de sa puissance et de sa
splendeur? Ses temples, ses pyramides, ses mo-
numens élevés pour la postérité , ses maisons,
tout a-t-il été réduit en poussière , comme les
hommes qui l’habitaient? Enfin je dirigeai la marche
vers quelques habitations qui se montraient
au sud. Au bout d’une heure , nous quittâmes;
au village d’al-E’âlyâb, le territoire de Djâhl,
pour entrer sur celui d’eï Mak Nimir ou Nemr ;
dont le premier village est Halïâouyeh. Des
habitans, accoururent, tout surpris de voir, au
lieu de troupes nombreuses qui devaient les
faire frémir, deux Turcs et cinq Arabes, car
mon interprète avait pris le costume de ceux-ci.
Par-tout on nous questionnait sur la distance à
laquelle l’armée pouvait ê tre , et la prudence
nous conseillait de répondre qu’elle allait sans
doute arriver, étant à peu de distance; qu’elle
hous suivait de près. Les ambassadeurs chargés