ainsi que BrucèTa supposé* : je questionnai les
naturels, et, à ma grande surprise, j’appris que
le Dender se décharge dans le fleuve Bleu
beaucoup plus au sud ; que les deux rivières s’y
rendent en suivant une ligne à-peu-près parallèle
, et qu entre l’embouchure de l’une et celle de
Fautre, il existe un intervalle assez considérable
pour embrasser quinze villages dans son étendile.
La rivière du Rahad peut avoir cent cinquante
à deux cents pas de largeur environ ; elle se
jette dans le fleüve à la hauteur d’Abou-Ahrâz,
village au nord de son embouchure ;• il n’y avait
que peu d’eau. Suivant le rapport des habitans,
j appris que le courant en est très-rapide ; qu’elle
déborde peu, étant bien encaissée; que l’eau se
trouble a peine au moment de sa crue, qui
dure quatre mois de l’année, et que, dans ses
basses eaux j elle est presque à sep sur plusieurs
points. II y a , dit on, quelques hippopotames
et des crocodiles qui s’y introduisent par le
fleuve Bleu, au moment de l’inondation. Ses
bords paraissent être bien boisés et fertiles. Le
soir nous attachâmes notre barque près d’Ouâd-
Modeyn, grand village sur la rive gauche.
II suppose que le Rahad et le Dender confondent leurs eaux à quatorze
lieues au-dessus de l'embouchure commune qu’il leur assigne.
J ’appris que le roi de Sennâr avait fait sa
soumission; qu’il était venu jusqu’ici au devant
du pacha, avec pompe et magnificence, accompagné
de ses ministres, des principaux habitans
et de deux cents hommes d’escorte ; que le
pacha et lui s’étaient fait réciproquement des
dons d’armes, de chevaux, de vêtemens, et que
depuis quelques jours l’armée .turque avait pris
possession de la capitale.
Le 12 juin, nous pûmes à peine faire trois
ou quatre lieues : nous nous arrêtâmes au-dessus
de Kourdkeyïeh, village situé sur la rive droite,
et qui est environné ■ par des massifs d’arbres
et d’arbustes dont les rameaux hérissés d’épines
semblent vouloir en interdire l’accès. Les
pintades sont ici communes. Près de Kourd-
keyleh, au nord du village, le fleuve a tout au
plus trois cent cinquante pas de largeur. Cinq
hippopotames se montrèrent ce jour-là à mes
regards : trois à-la-fois suivirent quelque temps
ma barque en mugissant. Je n’en avais encore
vu que de hoirs; l’un de ceux-ci avait la peau
fauve : peut-être était-ce une variété inconnue;
car dans tout le cours de mon voyage, je n’en
ai vu que deux 'de cette couleur. Les habitans
nomment cet amphibie bagar el-bakür [ le boeuf