à fleurs rose. A onze heures, nous arrivâmes sur
le bord du fleuve, en face d une île couverte en
partie d’acaciasv Ici la végétation étalait tout son
lüxe ; les arbrisseaux et les lianes entrelacés,
formaient des tissus de verdure pittoresques;
de grands espaces de terrains étaient entièrement
tapissés de basiïic. A midi et demi , après avoir
traversé un petit village, nous entrâmes dans
un bois où des Turcs mirent de nouveau le feu,
et nous causèrent des alarmes plus vives encore
que la dernière fois. Le pacha fermait les yeux
et n’osait faire châtier les coupables, tant les
troupes étaient mécontentes. Depuis le départ
de Sennâr, on n’avait encore fait aucune distribution
de dourah : c’était pourtant toute la
nourriture de ces pauvres gens; il fallait qu’ils
Vécussent de ce qui leur tombait sous là main.
De fautre côté du fleuve, les troupes faisaient
des feux semblables : ils étaient devenus des
signaux qui servaient à régler les marches. Peu
importait que ces passe-temps bizarres fissent
courir le risque de voir sauter les poudres, renfermées
dans de simples barils portés par des
chameaux ! On traversa à trois heures le petit
village de Guelqàne; à quatre heures et demie,
l’armée campa au sud de celui de Ferhânneh,
dans un bois de très-grands acacias. Ce village,
voisin du fleuve, est situé sur une élévation :
c’était le lieu le plus agréable où nous eussions
campé depuis notre départ de Sennâr. Le lit
du fleuve , nullement embarrasse, me parut
avoir cinq à six cents pas de largeur.
Le prince Ismâyl, toujours très-actif, ne
donnait aucun instant à l’oisiveté : il fit faire,
avant la fin du jour, l’exercice du canon, et
chargeait lui-même une pièce avec autant de célérité
que les canonniers qui l’entouraient. Le
besoin de se rendre ami des troupes l’engageait
à prendre avec elles un air de familiarité.
Tous les villages que nous rencontrions étaient
impitoyablement pillés par les soldats, qui se
disputaient les provisions de bouche : je fus
obligé de faire comme eux pour avoir un peu
de dourah, quelques poules, des fruits de baobab
et des gousses fraîches de tamarinier; seuls
objets qu’eussent laissés les habitans, qui prenaient
la fuite à notre approche. Le 14 , on
partit à quatre heures trois quarts du matin, en
continuant à se diriger dans des bois presque
impénétrables. A sept heures et demie, nous
passâmes à Ahmar, petit village entouré de
baobabs : cet arbre était désormais commun