de douleur. Leurs corps restèrent exposés nus,
pendant deux jours, aux regards du public.
Cette tragédie épouvantable , inconnue jusqu’alors
au Sennâr, fit sur l’esprit des habitans une
impression peu favorable à celui qui l’avait ordonnée
: on le traitait assez ouvertement de barbaré;
et les Turcs passèrent dès ce moment à
leurs yeux pour un peuple sauvage et féroce.
Hassan-Regeb fut long-temps tenu en prison :
enfin il obtint sa liberté, du< consentement des
fils d’A’dlân eux-mêmes. Il fit valoir en sa faveur
qui si A’dlân avait succombé sous les coups de
Niknitt et d’Ouâd-A’quindi, il n’avait fait que
recevoir le juste châtiment dé ses crimes ; que
c’était le sang de son propre frère, assassiné par
ses ordres, qui était retombé.sur sa tête ; que lui
Regeb était l’ami intime, le compagnon d’armes
de ce frère; qu’à ce titre, indigné d’une action
aussi contraire aux lois dé la nature, il s’était
cru appelé à en tirer vengeance.
Le cheykh Bâdy obtint le consentement du
pacha pour fêter le Ramadân suivant l’usage
du pays. Le 3 juin, troisième jour de cette solennité
, Râdy, accompagné de ses ministres et
de ses premiers écuyers, déployant toute la pompe
et toute la magnificence qu’avait pu comporter
sa puissance expirante, et escorté de cent hommes
de sa garde portant la haste, le sabre et le bouclier
, parcourut la ville. Un grand concours de
peuple le suivait ; les femmes exprimaient par
des cris et des roulement de voix qui jeur sont
propres, la joie et le contentement que faisait
naître la présence du monarque : cette journée
dut faire oublier à Bâdy que son règne était
passé, ou plutôt le lui rappeler en excitant dans
son apie des regrets bien amers, Le cortège
s’arrêta devant la maison du pacha pour donner
à celui-çi le spectacle d’un combat simulé. Les
cent gardes de Bâdy se séparèrent en deux corps ;
ils se saluèrent de leurs armes, et s’avancèrent
l’un sur l’autre, agitant leurs piques horizontalement
, le jarret ployé, sautant alternativement
sur chaque pied. S’étant approchés, à une certaine
distance, ils se tinrent accroupis x se couvrant
alors en entier de leurs longs boucliers : en
cette position, ils faisaient un pas, sautaient à
droite et à gauche, comme pour, éviter le fer de
l’ennemi. Au moment de lancer la haste, ils
poussent up cri aigu , qui semble destiné à avertir
l’adversaire de se tenir sur ses gardes et de
parer le coup : les hastes partent, et sont reu_
voyées réciproquement d’une troupe à l’autre.
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