était que I armée entière du pacha devait succomber
à l’approche de la capitale du Sennâr,
ou se trouvaient quatre grosses pièces de canon
êt huit à dix mille combattans. Son récit ne
m inspira pas de grandes craintes sur le sort
d Ismayl et des siens. Après, une heure et demie
de marche dans le nord-ouest, j’arrivai enfin
sur I emplacement que je cherchais : j’y reconnus
effectivement les traces d’une ville ancienne ;
mais , ô douleur ! je n’aperçus de tout côté que
des monceaux de terre et de gravois ; pas une
seule pierre de quelque volume , pas un seul
pan de mur qui fût resté debout ; tous les matériaux
avaient été enlevés ! Je fis le tour de ces
tristes décombres, qui occupaient une lieue à-
peu-près de circonférence. J ’y comptai dix énormes
tas formés en partie de fragmens de grosses
briques cuites; que je supposai être les restes
des principaux édifices. Le grès s’y laissait voir
en si petite quantité, que je dus en inférer qu’une
extrême rareté de cette substance dans le pays,
avait jadis contraint tes habitans de ce lieu à
employer, meme dans leurs grandes Constructions,
des pierres factices, Les pluies, fréquentes
sous ce climat, ont battu et souvent en partie
nivelé la superficie de. ces décombres. Divers
fragmens de matières scorifiées feraient croire
que c’est par faction du feu qu’a péri cette antique
cité, comme celles de Coptôs, d’Ombôs
et autres de l’Egypte, si l’on ne pouvait pas
supposer également que ces scories sont des
résidus provenant des fourneaux de quelques fabriques.
A-peu-près au centre de tous ces débris
épars ou amoncelés, j’eus le bonheur inespéré
de découvrir un indice irrécusable de leur antiquité
: c’était un sphinx d’un mètre 50 centimètres
[ 4 pieds et demi environ ] de longueur,
Couché sur le sol ; la matière dont il est formé
est un grès de, concrétion quartzeuse, noirâtre :
quoique mutilé, on reconnaît le corps d’un belier,
qui pouvait avoir la figure humaine : le travail
en est médiocre et dans le goût égyptien. Ces
ruines sont au milieu d’une plaine inculte , à un
demi-quart de lieue du fleuve, et sont entourées
d’acacias épars. Aux environs , habitent des
Arabes Maq’arbehs.
Je retournai le soir à la barque , et nous
mîmes à la voile. Durant ma course à Sobah,
mes mariniers avaient trouvé sur le sable douze
oeufs de crocodiles ,qu’ils m’apportèrent : j’en
brisai un et j’y trouvai,un petit crocodile mort;
ce qui me fît juger qu’ils étaient tous mauvais :