noirs, étaient nombreux aussi; ils s’accouplent
quelquefois avec; les brebis, s’il faut en croire
les indigènes : lorsqu’on eut appris au pacha
cette singularité vraie ou fausse, ce ne fut plus
qu’en affectant un grand scrupule qu’il mangea
du mouton. A l’exemple des Turcs, nous fîmes
bonne chère à Kilgou, nous dédommageant un
peu de l’abstinence à laquelle nous avions été
condamnés depuis le Sennâr.
Tout en chassant des oiseaux , je tuai trois
petits cochons de lait ; et nous cachant pour ne
point scandaliser nos cQmpagnons de voyage,
nous les fîmes cuire et nous nous en régalâmes
sans le moindre remords de conscience.
J ’étais à dîner avec Ismâyl, lorsque nous
eûmes une alerte occasionnée par quelques
nègres qui avaient tenté de s’échapper ;. dix à
douze mille de leurs compatriotes, disait-on,
s’étaient réunis sur la montagne voisine, pour
venir dans la nuit les délivrer tous. Sans ajouter
pleinement foi à cette annonce, le pacha prit
néanmoins des précautions; mais personne ne
parut.
Le 24 décembre, nous résolûmes, M. Le-
torzec et moi, d’aller voir de près les habitations
où les Turcs venaient de porter la désolation et
“ la mort, au mépris de tous les droits de la nature
et des gens. Munis de nos armes, nous avancions
en nous tenant sur nos gardes; car il restait
encore quelques nègres et de vieilles femmes
qui, n’ayant pu fuir, avaient pris le parti de
demeurer cachés. Ce ne fut pas sans de fort
grandes difficultés que nous parvînmes au haut
de la colline : il fallait, par des sentiers escarpés
et raboteux, nous aider de nos mains pour 11e
pas glisser sur les blocs arrondis de granit qui
les tapissaient. Le corps des cabanes circulaires
qui faisaient l’objet de notre excursion, était
construit en terre argileuse; la couverture était
en chaume. On reconnaissait facilement toutes
les dépendances de la propriété d’une même famille
: c’étaient toujours quatre ou cinq maisonnettes
liées les unes aux autres par de petits
murs, qui formaient des cours peu spacieuses■
entourées de banquettes en terre. Quelques
huttes de la même forme que les bâtimens
d’habitation, mais n’ayant que deux mètres de
circonférence, étaient destinées à serrer le dourah
ou à servir de poulailler. A l’inspection de l’intérieur
de ces demeures rustiques, je jugeai que
leurshabitans n’ont point, comme les musulmans,
l’usage de s’accroupir à terre pour vaquer à diffe