abandonné. Ces ruines, que je ne pus visiter de
près, me parurent être celles de constructions
faites par des Coptes.
A trois heures, nous rejoignîmes le Nil à
Tirguissé, après avoir laissé derrière nous plusieurs
grandes îles. Nous pouvions à peine nous
faire jour au travers d’un fourré épais de genêts,
de jeunes acacias, asclepias gigantea, et
d’une quantité d’autres plantes et arbrisseaux,
parmi lesquels j’en distinguai un dont le bois
savonneux, facile à diviser en fîlamens, est employé
par les Arabes, en guise de brosse, pour
se frotter les dents.
A quatre heures, nous campâmes àel-Fât,
petit village dont les cultures sont assez étendues
: nous fûmes surpris de voir de beaux
champs de dourah en vert, tandis que, depuis
deux mois, cette graine était récoltée dans la
basse Nubie ; mais nous apprîmes que l’on en
faisait ici deux récoltes par an. Nous «eûmes
beaucoup à souffrir d’un fort vent du nord qui
souffla toute la journée, en élevant des tourbillons
de sable.
Le 5 , à sept heures et demie, nous continuâmes
à longer le fleuve à une distance plus
ou moins rapprochée. J ’aperçus dans le désert
un assez grand nombre d’arbrisseaux d’une belle
végétation. Au nord, quelques montagnes de
grès dominaient sur la plaine. A dix heures et
demie, nous étions à Deffâr, village en ruines,
situé à cinquante pas du Nil, sur un rocher
élevé. Ce village , presque entièrement construit
en pierres froides extraites de la montagne ,
était fortifié; il subsiste encore quelques pans
des murs qui l’entouraient, et des restes de petites
tours rondes, percées de meurtrières, dont
ils étaient flanqués. Je trouvai parmi ces ruines
une petite colonne de granit couchée sur le
sol ; elle a 3 mètres de longueur ; son chapiteau,
non achevé, est orné de la croix grecque. Dans
l’intérieur du château, il existe un puits moitié
taillé dans le grès, et moitié en maçonnerie,
qui a 2 mètres sur 4 de largeur, et peut avoir
18 mètres [ 55 pieds ] de profondeur : il me paraît
être l’ouvrage des anciens, q u i, suivant
moi, avaient bâti sur ce rocher avant que les
Musulmans vinssent y faire de nouvelles constructions.
Après avoir consacré une heure et
demie à l’exploration de ces décombres, nous
nous remîmes à longer le fleuve, d’abord d’assez
près, puis à la distance d’un quart de lieue : ici
nous débouchions sur une vaste plaine, où les