d eau j . son cri a quelque rapport avec le mugissement
du boeuf; mais iï est plus bref et plus
éclatant. Je tirai sur un, et le blessai, je crois,
car il se cacha aussitôt en criant. Il n’y a point
d exemple dans le pays que ces animaux aient
attaqué f homme. Ils viennent à terre, et dévorent
quelquefois la récolte d’un champ entier;
ie feu et le bruit les font fuir, 'j ’ai remarqué
que les crocodiles sont moins abondans à cette
hauteur du fleuve, où se multiplie l’hippopotame.
Le 13, nous n’avançâmes encore que de
quelques,lieues, les vents soufflant toujours du
sud-est. A peu de distance, sur la rive gauche,
nous aperçûmes le village de Rossâs. Le sol ,
depuis Râs el-Gartoum , présente sur divers
points une gangue ou eoncrétión calcaire renfermant
des détritus de plantes inarines qui
imitent une multitude de racines ; f elle est
poreuse, et en partie friable. Près d el-E’rey-
bab, les rochers calcaires qui bordent le fleuve
prouvent assez la présence antérieure de la mer
dans ces contrées : ils sont percés parfois de
trous cylindriques arrondis à leur ouverture , et
que l’on reconnaît facilement pour être l’ouvrage
des pholades. La superficie de ces rochers est
en partie teinte par l’oxidè de fer.
A l’aube du jour, je voulus entrer dans
le bois de Kourdkèyleh , pour y surprendre
quelques animaux; j’y vis beaucoup de singes,
les traces fraîches de l’élephant, des pintades,
et divers oiseaux à beau plumage, mais ne poussant
que des cris aigus. Depuis les pharaons,
peut-être , aucune barque n’avait déployé ses
voiles sur le fleuve où je naviguais; ce n’était
pas sans une douce satisfaction que je voyais la
mienne devancer toutes lés autres, et lutter
contre les vents dans des parages où les regards
d’aucun Européen n’avaient encore pénétré !
J ’éprouvais aussi une émotion involontaire , en
contemplant ces arbres vainqueurs du temps,
et que la vieillesse n’a pciïnt courbés ; ces bois,
épais dont l’éternel feuillage n’offrit jamais au
voyageur son ombre tutélaire contre les rayons
brûlans du soleil ; ces fourrés inaccessibles où le
pasteur ne conduisit jamais ses troupeaux. La nature
brute et saùvage respire seule au milieu de
cette végétation sans cesse renaissante ; les acacias,
les nébkas, les heglygs, les arbres morts eux-
mêmes, enlacés dans les circonvolutions inextricables
des lianes, ne forment qu’un massif
compacte de Verdure, a travers lequel quelques
sentiers, à peine praticables ; permettent de se