50 VOYAGE À MÉROE,
ce prince ne prenait point les médicamens qu’ils
lui administraient, avant qu’ils en eussent bu
eux-mèmes une partie. Mais cela n empêchait
point qu’iï ne fût presque toujours la dupe de
leur astuce et de leur talent consommé pour
l’intrigue.
CHAPITRE XXV.
Rapports d’Européens. — Méjflise sur ïa position dé Méroé. —
Force de ï’armée ; résistance des Chaykyés. — Mort d’un
Européen. — Parlementaires. — Avant-garde, combat; craintes
pour l’armée turque ; valeur cFA’bdm bey , victoire d’Ismâyl.
—r4 Cruauté des Turcs. — Oreilles coupées aux Chaykyés.—
Cruauté d’un Grec. — Envoi de têtes et d’oreilles au Caire. —
Incendie de Korti. — Trait généreux d’Ismâyl.
J ’ACQUIS auprès d’A’bdin bey une connaissance
exacte de l’armée d’Ismâyl pacha. A’bdin
bey, Haggi-Hammed et Omar kâchef abachie,
commandaient chacun quatre cents cavaliers
osmanlis. II y avait de plus quatre cents hommes
de cavalerie composée d’Arabes Bédouins et de
Mohgrebins. Mohammed aga bulbachi - chers-
sismé était à la tête de six cents fantassins osmanlis
et de trois cents canonniers ; huit cents
Bédouins et Mohgrebins étaient conduits par
divers chefs arabes \ Les cheykhs Kalif et
Daoute kâchef commandaient sept cents Abâb-
dehs ; ce qui portait l’armée à quatre mille
hommes, dont dix-huit cents de cavalerie. Deux
mille domestiques et trois mille chameaux étaient
en outre attachés à sa suite. On comptait vingt-
quatre pièces de canon de quatre. Le pacha
avait une garde particulière de vingt mamlouks.
Les fonctions diplomatiques étaient remplies par
trois ulmas, dont les plus grands efforts tendaient
à subjuguer les peuples par la persuasion,
pour éviter l’effusion du sang. Ils réussirent souvent
dans cette honorable mission, et reçurent
chacun une récompense de 6,000 francs et des
vêtemens d’honneur.
A’bdin bey voulut bien me donner, sur la
marche des troupes et sur les événemens militaires
qui avaient eu lieu jusqu’à ce jour, de
* Les Arabes Mohgrebins sont ceux qui habitent la côte de
Barbarie la pïns rapprochée de FÉgypte. Les Arabes Bédouins sont
ceux qui vivent sous des tentes sur les frontières du désert, même
en Egypte, à i occident du fleuve. Ces Bédouins sont les meilleurs
soldats, et les Abâbdehs sont les plus mauvais : les premiers naissen t
cavaliers, et sont constamment exercés à la guerre et au pillage;
les Abâbdehs, au contraire , sont des commerçans conducteurs de
caravanes , que le pacha voulut incorporer parmi ses troupes dans
le principe de cette expédition.