à peine, en effet, qu’elles pussent résister à un
pareil train de vie; les animaux eux-mêmes, qu’il
fallait à chaque instant délaisser sur ïa route,
ne pouvaient plus supporter de si dures fatigues.
A la suite de longues et pénibles traites, le
soldat, à peine arrivé sous sa tente, devait
aller grimper sur les montagnes et courir après
les nègres. Quelque impatient que fût Ismâyl
d’arriver à Qamâmyï, pour savoir à quoi s’en
tenir sur l’or après lequel il soupirait, force lui
fut de donner à ses hommes un peu de répit, et
nous passâmes ici la journée du 17. J ’avais eu
peine à m’expliquer comment les soldats pouvaient
se nourrir : souvent on arrivait à la nuit;
toutes les provisions qmils pouvaient porter avec
eux, c’était un peu de dourah; ceux qui en
avaient étaient obligés de le réduire en farine
sur une pierre, avec une molette à main; il
fallait travailler une heure pour en triturer là
ration d’un homme , faire la pâte et la faire
cuire; tout ce temps diminuait celui du repos,
ordinairement fort court.
La plupart, il est vrai,'se contentaient de
faire bouillir leur dourah, et le mangeaient avec
sa pellicule. Mais le premier devoir pour tous
était de parcourir d’abord les environs pour
chercher de quoi nourrir les animaux, quils
avaient un si grand intérêt à conserver. Pour
nous, comme j’avais eu soin de faire faire du
biscuit au Sennâr, nous étions beaucoup moins
à plaindre, grâce à nos chameaux, qui nous
rendaient le service inestimable de le porter.
Le 18 janvier, l’armée se mit en route à six
heures trois quarts : nous fîmes plus d une demi-
lieue dans le lit même du Tournât, qui court ici
nord et sud; il y avait, au milieu, de 12 à 20
centimètres d’eau ; nous en sortîmes pour suivre
sa rive gauche. A huit heures et demie, nous
eûmes à franchir un petit torrent dont les bords
étaient très-éleves; puis nous montâmes sur des
coteaux couverts de champs de dourah. Ici la
terre était chargée d’un sable ferrugineux; des
roches graniteuses et feld-spathiques constituaient
la nature des collines Cet aspect géologique et
les informations que j’avais sur le pays, me firent
reconnaître que nous approchions des lieux
signalés comme recélant de l’or. A huit heures
trois quarts, nous longeâmes les montagnes de
Qassân, situées à l’ouest de notre route, et
couvertes de nombreuses habitations : les nègres
avaient promis de donner au pacha cinq cents
esclaves mâles pour leur village et quelques