suite. A peine était-il arrivé sur la grande place du
marché, qu’il fut assailli par trois cents hommes
armés : il succomba le premier sops leurs
coups; ses domestiques ét les sept personnes
de sa suite subirent le même sort. Un interprète
fut le seul .qui opposa quelque résistance ;
il tua avec ses pistolets deux de ces assassins,
et tomba percé d’un coup de lance. La cupidité,
'non moins qu’une crédulité stupide; fut sans
doute le motif qui porta le prince à Une trahison
aussi atroce. M. du Roule étalait un luxe imprudent
; ii avait soixante chameaux chargés de
bagages et d’objets précieux : c’était plus qu’il en
fallait pour exciter la convoitise de ces harbares.
L’empereur abyssin, plein de courroux en
apprenant un aussi noir attentat, résolut d’en
tirer vengeance, et envoya une armée contre
le Sennâr; mais cette armée n’eut pas tout le succès
qu’il en attendait. Ii s’en consola en menaçant
les habitans qu’il se vengerait plus tard,
puisque Dieu avait mis dans ses mains les
sources de leur fleuve*.
Le 10 août, on commença à s’apercevoir que
* je dois ces détails à l’obligeance de M. de Jussieu, qui possède
un manuscrit sur la botanique de la Nubie, en partie extrai
des lettres de M. du Roule et de telles de M. Lippi.
le fleuve diminuait. Pendant sa crue, qui dura
tout le'mois de juillet, il charia une quantité
de bois de diverses espèces, des bambous,
beaucoup de bois durs étrangers à l’Égypte, mais
point de bois de palmier. Les habitans et les
soldats étaient sans cesse occupés à saisir à la
nage ces pièces de bois, qui tous les ans suffisent
pour approvisionner un grand nombre de
riverains.
Depuis long-temps je sollicitais du pacha la
pérmission d aller voir le fleuve Blanc à ïa
hauteur de Sennâr , le Rahad etïeDender ; mais
Comme il devait y aller lui-même, il me retenait
toujours, afin que je fisse ces courses avec lui; car
sans sa présence, me disait-il, et avec ses troupes
mêmes, j’aurais des risques à courir. Ce prince
cependant préparait une petite expédition pour la
province d el-Aïze, et je ne pus en profiter : il
prit soin de me cacher son projet, et m’assura
que ces troupes n’iraient point au fleuve Blanc,
afin que je ne lui demandasse pas à les suivre.
expédition, composée de trois Cents hommes
commandés parDivan-Efïendy, partit lé 22,
et revint au bout de dix-huit jours: c’est alors
qûe j’appris que j’avais été trompé ; ce déta-
ehèment s’était avancé jusqu’au fleuve Blanc*
2 0 *