jour-Ià, il ne me fut plus possible de les retrouver;
ils avaient pris la fuite, II fallut bien
prendre son parti : M. Letorzec, et un de mes
Arabes que la fièvre venait de quitter, m’aidèrent
à charger nos huit chameaux, et nous quittâmes
Sennâr le 7, à cinq heures du soir. Les troupes
d Ismâyl étaient en avant; nous atteignîmes les
traîneurs à une heure de la ville : on campa sur
le lieu quTbrahym avait quitté. Cinq cents
hommes d Ismâyl avaient passé sur la rive droite
du fleuve, et devaient y suivre leur route.
Le 8, on partit à neuf heures, en suivant le
fleuve à un quart de lieue environ de distance :
nous traversions de vastes plaines incultes couvertes
de plantes herbacées ; à i ouest nous avions
en vue deux villages éloignés. A une heure trois
quarts, nous laissâmes derrière nous le hameau
de Rournekel, situé à une demi-lieue du fleuve.
Revenus s u r la grève, nous apercevions, à un
quart de lieue dans 1 ouest, deux grands villages,
dont le plus sud se nomme el-FoIleyh. A quatre
heures , nous étions dans un petit bois d’acacias
et de nebkas, où nous tuâmes plusieurs beaux
oiseaux que je conservai, A une heure de là,
la rive orientale est tapissée d’une longue suite
de grands acacias et autres arbres. Ici, un de
mes chameaux tomba déjà de latigue, et il fallut
l’abandonner avec sa charge de dourah. De
vastes champs cultivés nous annoncèrent l’approche
de quelque bourgade importante : en
effet, après huit heures trois quarts de marche,
on entra dans Hellet el - Chérif Mahammed ,
où nous couchâmes. Lçs habitans nous accueillirent
avec une hospitalité vraiment fraternelle :
un grand nombre d’entre eux quittaient leurs
maisons pour les offrir aux soldats, et portaient
des tiges de dourah aux chameaux; il n’était pas
jusqu’à leur souper qu’ils engageaient cordialement
les Turcs à partager avec eux : pour
notre compte, nous nous trouvâmes fort bien
d’un plat de bâmyeh, d’un autre de farine de
dourah cuite avec du lait, qu’on nous servit
obligeamment. Je fus moins surpris d’une si
bonne réception, lorsque je sus que les habitans
étaient pour la plupart des Arabes Qenânehs :
nous allions battre les Kaffères, ennemis des
musulmans; c’est pourquoi ils nous comblaient
de bénédictions et de témoignages d’amitié.
Dans la nuit , Ismâyl arriya avec sa suite.
Comme il continuait sa route sans s’arrêter, il
fallut quitter, quoique à regret, cetexcellent gîte
d’étape.