auraient réunies pour en former à la longue des
stratifications diverses, qui par la suite auraient
passé à l’état de pétrifications.
Je n’ai parlé ici que du calcaire coquillier disposé
en couches pierreuses, formant des collines
et des montagnes, parce que mon but, dans ce
paragraphe, n’est que de considérer les corps
marins de cette nature, comme pouvant donner
naissance , par leur multiplication immense et par
leur accumulation, à des bancs entiers qui ne sont
formés absolument que de ces corps ou de leurs
débris. C’est pourquoi je ne fais point mention
ici de ces immenses amas de coquilles connues
en Touraine sous le nom defaluns, sur lesquels
Réaumur a publié un excellent Mémoire dans
ceux de l’Académie des Sciences en 1770. Cet
habile naturaliste ne laissa pas échapper l’observation
géologique suivante. Ayant déterminé
l’étendue du faluns à neuf lieues carrées de
surface, et les couches entièrement coquillières
à dix-huit pieds d’épaisseur moyenne, le calcul lui
donna cent trente millions six cent quatre-vingt
mille toises cubiques de matière coquillière.
M. de Réaumur n’avait voulu prendre dans
son calcul que le minimum d’étendue et de profondeur
de la masse exploitée; et il en prévient
ep convenant que l’on extrait le falun a vingt-deux
pieds de profondeur, et que si l’eau ne gênait
pas les ouvriers, on creuserait bien plus profond
dément encore.
Il reste maintenant à répondre à une objection
que font naturellement ceux qui, n’ayant ni observé
ni étudié les productions de la mer, et ne
pouvant par conséquent se former une idée de
leur étonnante multiplication , demandent si ce
qui a eu lieu autrefois relativement aux corps
marins fossiles, dont tout atteste le nombre immense,
puisque des collines et même des montagnes
entières en sont formées, s’opère à présent
dans les mers que nous connaissons.
Pour répondre d’une manière positive à cette
question, nous allons choisir un exemple à portée
de nous : car si nous voulions porter nos regards
vers les latitudes équatoriales, où la nature développe
de préférence tous les genres de fécondité,
de manière qu’il n’y a pas une place dans ces
mers qui ne soit peuplée d’êtres vivans de tous
les genres et de toutes les espèces , on pourrait
dire qu’il n’est donné qu’à un petit nombre d’observateurs
d’aller contempler la nature dans des
lieux aussi lointains, où toutes les forces vitales
sont en action et en mouvement pour produire et
multiplier des êtres de tant d’espèces.
Portons donc nos regards vers des latitudes beaucoup
plus l’approchées de nous ; choisissons des
mers moins fertiles, et où le froid qui s’y fait sentir
doit ralentir nécessairement pendant plusieurs
mois l’énergie des ressorts de la vie, et en éloigner
un grand nombre d’espèces qui ne sauraient se
Tome JI. 5