ordres de Cortez, fut pendu par les pieds, en i 5a i , comme cela est prouvé par
une histoire hiéroglyphique très-précieuse, conservée au couvent de San Felipe
Neri à Mexico Mais comment ce roi, neveu de Montezuma, figureroit-il dans
la famille des seigneurs ou tlatoanis d’Azcapozalco ?
.Ce qui est certain, c’est què lorsque le dernier de .ces princes fit composer
le tableau généalogique de ses ancêtres, son père et son grand-père vivoient
encore. Cette circonstance est clairement indiquée par les petites langues
placées à quelque distance de la bouche. Un homme mort, disent lesnaturels,
est réduit au silence éternel : d’après eux, vivre c’est parler; et, comme nous
le verrons bientôt, parler beaucoup est une marque de pouvoir et de noblesse.
Ces figures de langues se retrouvent aussi dans le tableau mexicain du déluge,
que Gemelli a publié d’après le manuscrit de Siguenza. On y voit.les hommes,
nés muets, qui se dispersent pour repeupler la terre, et un oiseau, qui leur
distribue trente-trois langues différentes. De même un volcan, à cause du bruit
souterrain que l ’on entend quelquefois dans son voisinage, est figuré, par
les Mexicains, comme un cône au-dessus duquel flottent plusieurs langues : un
volcan est appelé la montagne qui parle.
Il est assez remarquable que le peintre mexicain n’a donné qu’aux trois
personnes qui étoient vivantes de son temps, le diadème (copilli), qui est un
signe de souveraineté. On retrouve cette même coiffe, mais dépourvue- du
noeud qui se prolonge vers le dos, dans les figures des rois de la-dynastie
aztèque publiées par l’abbé Clavigero. Le dernier" rejeton -des seigneurs
d’Azcapozalco est représenté assis sur une chaise indienne, et ayant les pieds
libres : des rois morts, au contraire, sont figurés non-seulement sans langue,
mais aussi les pieds enveloppés dans le manteau royal ( xiuhtilmatli)^c,e.^im
donne à ces images une grande ressemblance avec les momies égyptiennes.
Il est presque superflu de rappeler ici l ’observation générale-que, dans toutes
les peintures mexicaines, les objets réunis à une tête, au moyen d’un fil,
indiquent à ceux qui savent la langue des naturels, les noms des personnes
que l ’artiste a voulu désigner. Les naturels prononcent ces noms dès qu’ils
voient l ’hiéroglyphe. Chimalpopoca signifie un bouclier qui fume ; Acamapitzin,
une main qui tient des roseaux : aussi, pour indiquer les noms de ces deux
rois, prédécesseurs de Montezuma, les Mexicains peignoient-ils un boucher et
1 Voyez mon Essai politique sur la Nouvelle-Espagne, p. i 85.
une main fermée, fiés par un fil à deux têtes ornées du bandeau royal. J’ai
vu que, dans des tableaux faits après la conquête, le valeureux Pedro Alvarado
étoit figuré avec deux clefs placées derrière la nuque, sans doute pour faire
allusion aux clefs de Saint Pierre, dont le peuple voyoit partout les images
dans les églises des Chrétiens. J’ignore ce que signifient les traces de pieds que
l’on remarque dans le tableau généalogique, derrière les têtes. Dans d’autres
peintures aztèques, cet hiéroglyphe indique des chemins, des migrations, et
•quelquefois la direction d’un mouvement.
Pièce de Procès en écriture hiéroglyphique.
P a r m i l ’énorme quantité de peintures trouvées par les premiers conquérans,
chez les peuples mexicains, un nombre très-considérable étoit destiné à servir
de pièces justificatives dans des causes litigieuses. Le fragment qui est joint à
la généalogie des-seigneurs d’Azcapozalco offre un exemple de ce genre. C’est
une pièce d’un procès intenté sur la possession d’une métairie indienne.
Sous la dynastie des rois aztèques, la profession d’avocat étoit inconnue
au Mexique. Les parties adverses se présentaient en personne pour plaider
leur cause, soit devant le juge du lieu, appelé Teuctlij soit devant les hautes
cours de justice, désignées par les noms de Tlacatecatl, ou Cihuacoatl. Comme
là sentence n’étoit pas prononcée immédiatement après qu’on avoit entendu
les parties, celles-ci avoient intérêt à laisser entre les mains des juges une
peinture hiéroglyphique qui leur rappelât l’objet principal de la contestation.
Lorsque le roi présidoit l’assemblée des juges, ce qui avoit lieu tous les vingt,
et, dans certains cas, tous les quatre-vingts jours, ces pièces de procès étoient
mises sous les yeux du monarque. Dans les affaires criminelles, le tableau
représentoit 1 accusé, non-seulement au moment où le crime avoit été commis,
mais aussi dans les différentes circonstances de sa vie qui avoient précédé cette
action. Le roi, en prononçant l’arrêt de mort, faisoit, avec la pointe d’un
dard, une raie qui passoit par la tête de l’accusé figuré dans le tableau.
L’usage de ces peintures, servant de pièces de procès, s’est conservé dans
les tribunaux espagnols long-temps après la conquête. Les naturels ne pouvant
parler aux juges que par l’organe d’un interprète, regardoient l’eïnploi des
hiéroglyphes comme doublement nécessaire. On en présentoit aux différentes