« la grande inondation (apachihuiliztli) qui eut lieu, quatre mille .huit .ans
« après la création du monde, le pays d’Analiuac étoit habité par des géans
« ( Tzocuillixeque ) : tous ceux qui ne périrent pas furent; transformés en
« poissons, à l ’exception de sept. qui se réfugièrent dans des ' cavernes.
« Lorsque les eaux se furent écoulées, un de ces géans, Xelhua, surnommé
« l’architecte, alla à Cholollan, où, en mémoire de la montagne Tlaloc,
« qui avoit servi d’asile à lui et à six de ses frères, il construisit une colline
« artificielle en forme de pyramide : il fit fabriquer les briques dans la province
« de Tlamanalco, au pied.de la Sierra de Cocotl, et, pour les transporter
« à Cholula, il plaça une file d’hommes qui se les passoient de. main en main.
« Les dieux virent avec courroux.cet édifice, dont la cime devoit atteindre
« les - nues : 1 irrités contre l ’audace de Xelhua, ils lancèrent du feu sur la
« pyramide; beaucoup d’ouvriers périrent, l ’ouvrage ne.fut point continué,
« et on le. consacra dans la suite au dieu de l ’air, Quetzalcoatl. »
Cette histoire rappelle d’anciennes traditions de l’Orient, que les Hébreux
ont consignées dans leurs livres saints. Du temps de Cortez, les Cholulains
conservoient une pierre qui, enveloppée dans un globe de feu, étoit.tombée
des nues sur la cime de la pyramide : cet aérolitbe avoit la forme d’un crapaud.
Le père Rios, pour prouver.la haute antiquité, de cette fable de Xelhua,
observe qu’elle étoit contenue dans un cantique que les Cholulains chantoient
dans leurs fêtes, - en dansant .autour du. téocalli, et.que ce cantique commençoit
par les mots Tulanian. hululaez} qui ne sont d’aucune .langue actuelle du
Mexique. Dans toutes les parties du globe, sur le dos des Cordillères, comme
à l’île de Samothrace, dans la mer Egée, des fragmens de langues, primitives
. se sont-conservés dans les rites religieux.
La plate-forme de la pyramide de Cholula, sur laquelle j’ai fait un grand
nombre d’observations astronomiques, a quatre mille deux cents mètres.carrés.
On y jouit d’une vue magnifique sur le Popocatepetl, l’Iztaccihuatl ,. le pic
d’Orizaba, et la Sierra de Tlascalla, célèbre par les orages qui se forment
autour de sa cime : on voit à la fois trois montagnes plus élevées que le.Mont-
Blanc, et dont deux sont , des volcans encore enflammés. Une petite chapelle
entourée de cyprès, et dédiée à Notre-Dame de los Remedios, a remplacé
le temple du dieu de l ’air, ou de l ’Indra mexicain : un ecclésiastique , de race
indienne célèbre journellement la messe sur la cime de ce monument antique.
Du temps de Cortez, Cholula étoit regardé comme une tille sainte : nulle
part on ne trouyoit un plus grand nombre .de téocaUis,; plus 'de prêtres et
d ordres religieux ( Llamacazque ) , plus de magnificence- dans le culte, plus
d’austérité dans les jetmes etleapénitenceà, Depuis'l’introductidn du christianisme
parmi les Indiens, les symboles d’un nouveau' culte n’ont pas entièrement
effacé le souvenir, du culte ancien : le peuplersé porte en foule et de très-loin
à la cime de la pyramide, Apour y, célébrer là fête de la Vierge : une crainte
secrète, un respect, religieux, saisissent, l ’indigène à la vue de cet immense
monceau de briques, couvert d’arbustes et d’un gazon toujours frais.
Nous avons indiqué plus bautrlà grande analogie de construction que l'on
observe entre les téocallis mexicains et le temple de Bel ou Bélus, à Babÿlone:
cette analogie, avoif déjà frappé M. Zoegà, quoiqu'il n’eût.pufiprocurèr.que
des descriptions très-incomplètes du groupe dés pyramidesr.de Téotihuacan ’.
Selon Hérodote, qui visita Babylone'e;t vicie temple de Béhisycé monument
pyramidal avoir huitassises : sa hauteur étoit d’un stade ; la largeur de sa basé
égaloit sa hauteur ; le. mur qui formoit l ’cnceintc extérieure, le.rrtp/poAos, avoit
deux stades en carré. ( unhstade commun olympique avoit cent quatre-vingt-
trois mètres, 1er stade égyptien n’en a que quatre-vingt-dix-huit ï g , là pyramide
étoit construite, de briques et d’asphalte ; , elle .avoit un temple (mis) à sa cime
et un autre près de sa base nie premier, d’après-Hérodote, étoit sans statues;
il n’y avoit qu’une table d’or et un lit sur lequel couchoit une femme choisie
par le dieu Bélus3. Diodore de Sicile, au contraire, assure que ce temple supérieur
renfermoit un autel et trois statues, auxquelles il donne, d’après, des idées
tirées du culte grec, les noms de Jupiter, de Junon et de Rliéa3 : mais ces statues
et le monument entier n’existaient plus du temps de Diodore et de Strabon.
Dans les téocallis mexicains on distinguoit, comme dans le temple de Bel, le
naos inférieur de celui qui se trouvoit sur là plate -forme de la pyramide :
cette même distinction est clairement indiquée dans les Lettres de Cortez et
dans 1 Histoire de la conquête, écrite par Bernai Diaz, qui demeura plusieurs
* Zoega, de origine Obeliscorum, p . 5So.
* Vincent, Voyage de Néa rque , p. 56.
5 Hérodot. Lib. i , C. glxxx i— clxxxiii.
4 Diodor. Siculus, ed. Wesselingio, Tom. i , Lib. u , p . 123.
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