méthode admirable, inventée soit par les Hindoux, soit par les Tibétains1,
mais également ignorée des Grecs2, des Romains, et des peuples civilisés de
l’Asie occidentale. Les Mexicains accoloient leurs hiéroglyphes des nombres
à peu près comme les Romains répétoient les lettres de leur alphabet, cjui leur
servoient de chiffres. On ne sauroit être surpris de voir que 1 arithmétique
mexicaine ne présente pas d’hiéroglyphe simple pour des centaines au-dessus
de quatre cents, lorsqu’on se rappelle3 que les Arabes, jusqu au cinquième siècle
de l’hégire, connoissoient tout aussi peu des signes pour les nombres centenaires
au-dessus de quatre cents, et que, pour écrire neuf cents, ce peuple, justement
célèbre dans les annales des sciences, étoit obligé de placer deux fois le signe
de quatre cents à côté du signe de cent.
Il résulte de ce que nous avons exposé sur la manière de distinguer entre
elles les ligatures, et les années renfermées dans une ligature, qu’une époque
étoit déterminée en nommant à la fois le nombre des ligatures ou cycles, et deux
termes qui se correspondent dans les deux séries périodiques de treize nombres
et de quatre signes. La table suivante offre plusieurs époques remarquables
de l’histoire mexicaine, indiquées d’après l’ère des Aztèques. Il faut se rappeler
que ces peuples ne comptoient le nombre de leurs cycles, ou xuihmolpiüis, que
de l’année 1091, parce que, dans leurs annales, ils avoient établi un nouvel
ordre chronologique depuis leur sortie d’Aztlan, ou depuis le commencement
de leurs migrations vers le sud.
NahuiXiuhmolpilli, o ne Calli ( 4 -e Cycle, 2. Maison. ) .................... i 325. Fondation de Ténochtitlan.
Macuilli XiuhmolpiUi, ce Calli (S.e Cycle, 1 .Maison.).. i 38g. Avènement au trône du roi HuitzUihuitl.
Chicuace XiuhmolpiUi, chicuace Tochtli ( 6.e Cycle, 6. Lapin. ) . .. i 44.6. Grande inondation de la vüle de Mexico.
Chicóme XiuhmolpiUi, matlacdiomeyTochdi (7.® Cycle, 13. Lapin.). 1492. Arrivée de Colon aux Isles AntiUes.
Chicuei XiuhmolpiUi, ce Acati (8.® Cycle, 1. Canne. )................... 1019. Entrée de Cortez à Ténochtitlan.
Cbicuei XiuhmolpiUi', ome Tecpatl (8.® Cycle, 2. S ile x .) ... . 1Ô20. Mort de Montezuma.
Chicuei XiuhmolpiUi, ei CaUi ( 8.® C ycle, 3. Maison. ) .................... iÔ2i. Prise et destruction de Ténochtitlan.
Le même artifice de la concordance de deux séries périodiques étoit employé
pour distinguer les jours d’une même année. Il paroît qu originairement,
1 Georgii Alpfa. Tibet. G. x xm , -pag. 637.
’ Delambre , sur les fonds et les analogues des Grecs. (OEuvres d’Archimède, par Peyrard, pag. 575.)
3 Sylvestre de Sacy, Grammaire arabe ; 1810, P. 1, pag. y i v ;*
chez les peuples mexicains comme chez les Persans, chaque jour du mois aVoit
un nom et un signe particulier: ces vingt signes rappellent les yogas que,
dans l’almanach astrologique des Hindoux, l'on trouve ajoutés aux vingt-huit
jours des mois lunaires. Dans le MetztlapohualU, ou compte de la Urne des
Aztèques, on les distribua parmi les petits cjcles’ des demi-lunaisons; de
sorte, qu’une série périodique de treize termes, qrn tous étaient des chiffres,
correspondoit à une série périodique de vingt termes, qui ne'renfermoit que
des signes hiéroglyphiques. C'est dans cette série des jours qfiwl’on retrouve
les quatre grands signes, lapin, canne, sikx et maison , par lesquels, comme
nous venons de lé voir plus haut, on désignoit les années d'un même cycle;
seize autres signes d’un ordre inférieur étoient répartis'de manière qu'en
nombre égal de quatre ils séparoient' les grands signes les uns dés autres.
En se rappelant que chaque mois mexicain étoit divisé en quatre petites
périodes de cinq jours, on conçoit qu’originairement les hiéroglyphes lapin,
canrieî silex ■A maison, indiquaient le commencement de ces petites périodes
dans lès années dont le premier jour portait un des quatre signes nommés..
En effet, lorsque le premier du mois Tititl a le signe calli, le six de tous les
mois suivant: sera tochtli, le onze-serà acatl, èMe seizetecpatl: chaque mois
commencera pour ainsi dire par un dimanche, eticès dimanches tomberont,
pendant toute l’année sur les mêmes jours des mois. Les Mexicains mettaient
un intérêt particulier aux événemens arrivés un des quatre jours qui avoient
lès hiéroglyphes du cycle des années. Nous retrouvons les traces. de cette
superstition chez les Persans, qui, pour donner un signé{harkunan) à chaque
jour du mois, ajoutaient aux douze esprits célestes préposés aux mois dix-huit
ministres d’un ordre inférieur: Les Mexicains regardoient comme heureux
le jour qui portait le signe de l’année : les Persans1 distinguoient1 les jours
présidés par le même ange qui gouverne le mois entier.
Comme la plupart des peintures hiéroglyphiques représentées sur les •
planches qui accompagnent cet ouvrage, ont rapport aux sacrifices qui doivent
être faits dans chaque période de treize jours, on y trouve répétées plusieurs
L ang lè s , sur le Calendrier persan, dans Chardin, Voyage à Ispahan, Tom. n , pag. 265.