j q 3 v u e s d e s c o r d i l l è r e s ,
pierres, dans la forme des portes et des petites niches, et dans la distribution
des appartemens, offrent des traces du style péruvien: cette vérification intéresse
d’autant plus ceux qui se livrent à des recherches historiques, que nous savons,
par des témoignages certains, que les Incas construisirent la forteresse du
Couzco, d’après le modèle des édifices plus anciens de Tiahuanaco, situés
sous les 170 12' de latitude australe.
La pierre qui a servi à la maison de Huayna-Capac, désignée par Cieça '
sous le nom des Aposentos de Mulahalo, est une roche d’origine volcanique, un
porphyre à base basaltique brûlé et spongieux. Elle a été vraisemblablement
lancée par la bouche du volcan de Cotopaxi; car elle est identique avec les
blocs énormes que j ’ai trouvés en grand nombre dans les plaines de Callo et de
Mulalo. Comme ce monument paroît avoir été construit dans les premières
années du seizième siècle, les matériaux qui y ont été employés prouvent
que c’est à tort qu’on a regardé comme la première éruption du Cotopaxi,
celle qui a eu lieu en i 535, lorsque Sébastien de Belalcazar fit la conquête
du royaume de Quito. Les pierres du Callo sont taillées, en parallélipipèdes;
elles ne sont pas toutes de la même grandeur , mais elles forment des
assises aussi régulières que celles des fabriques romaines. Si 1 illustre auteur
de Y Histoire de ïAmérique* avoit pu voir un seul édifice péruvien, il
n’auroit pas dit sans doute « que les indigènes prenoient les pierres telles
qu’ils les avoient tirées des carrières ; que les unes étoient triangulaires,
les autres carrées; les unes convexes, les autres concaves; et que l’art trop
vanté de ce peuple ne consistoit que dans l’arrangement de ces matériaux
informes. »
Pendant notre long séjour dans la Cordillère des Andes, nous n avons jamais
trouvé aucune construction qui ressemblât à celle que 1 on appelle cyclopéenne :
dans tous les édifices qui datent du temps des Incas, les pierres sont taillées
avec un soin admirable sur la face extérieure, tandis que la, face postérieure
est inégale et souvent anguleuse. Un excellent observateur, M. Don Juan Larea,
a remarqué que, dans les murs du Callo, l’interstice entre les pierres extérieures
et intérieures est rempli de petits cailloux cimentés par de 1 argile. Je n ai
point observé cette particularité, mais je l’ai indiquée sur la Planche x xm ,
1 Chronica d e lP e rù , cap. 4* (éd. de i554> p- 108).
• Robertson, Hist. o f America, Vol. n i, pag. 4i4-
E T MONUMENS D E L ’AM É R IQ U E . Zg g
d après un croquis de M. Larea. On ne voit aucun vestige de plancher ou
de toit; on peut supposer que ce dernier a été en.Lois. Nous ignorons également
si l'édifice n'étoit primitivement que d’un seul étage; il a été dégradé, tant
par l'avidité des fermiers voisins qui en ont arraché des pierres pour les employer
ailleurs, que par les tremblemens de terre auxquels ce malheureux pays est
sans cesse exposé.
Il est probable que les constructions que j'ai entendu désigner au Pérou,
à Quito et jusque vers les bords de la rivière des Amazones, par le nom
A'inga-Pika, ou édifices de l'Inca, ne remontent pas au-delà du treizième siècle
de notre ère. Des constructions plus anciennes sont celles de Vinaque et de
Tiahuanaco, de même que les murs de briques non cuites, qui doivent
leur origine auz anciens habitans de Quito, les Puruays, gouvernés par le
Conchocando, ou roi de Lican, et par des Guastays, oü 'princes tributaires.
Il seroit à désirer qu’un voyageur, instruit pût visiter les bords du grand
lac de Titicaca, la province du Collao, et surtout le plateau de Tiahuanaco,
qui est le centre d'une ancienne civilisation dans l’Amérique méridionale. Il y
existe encore quelques restes de ces édifices, que Pedro de Cieça' a décrits
avec une admirable, simplicité : ils. paraissent n’avoir jamais été achevés, et,
à l ’arrivée des Espagnols, les indigènes en attribuoient la construction à une
race d’hommes blancs et barbus qui habitaient le dos des Cordillères longtemps
avant la fondation de l ’empire des Incas. L ’architecture américaine,
nous ne saurions assez le répéter, ne peut surprendre ni par la grandeur
des masses, ni par l ’élégance des formes; mais; on la considère avec d’autant
plus d’intérêt, qu’elle répand du jour sur l ’histoire de la première culture des
peuples montagnards du nouveau continent.
J’ai dessiné,-ï.0 le plan de la maison de l ’inca Huayna-Capac; a.0 une
portion du mur intérieur de l’appartement le plus septentrional, vu de dedans;
3.° la même partie vue de dehors, mais cependant de l ’intérieur de la cour.
Dans les murs extérieurs opposés aux portes des appartemens, on trouve, au
ieu de niches, des ouvertures donnant sur la campagne environnante. Je ne
déciderai pas si ces fenêtres sont des niches ( hooos ), qu’on a percées dans
des temps postérieurs à la conquête, lorsque cet édifice a servi de demeure
a quelques familles espagnoles. Les indigènes croient, au contraire, qu’elles
Cieça, cap. io5, p. a55.