hiéroglyphes qui présidoient au jour, à la demi-décade, ou à l’annéé. De là
l’idée d’accoupler des signes, et de créer ces êtres purement fantastiques que
nous trouvons répétés tant de fois dans les peintures astrologiques parvenues,
jusqu’à nous. Le génie des langues américaines qui, semblable à celui du
sanscrit, du grec et des langues d’origine germanique,; permet de rappeler
un grand nombre d’idées dans un seul mot, a facilité sans doute ces créations
bizarres de la mythologie et des arts imitatifs.
Les peuples, fidèles à leurs premières habitudes, quel que soit le degré de
lèur culture intellectuelle, poursuivent, pendant des siècles, là route qu’ils se
sont tracée. Un écrivain plein dé sagacité1 a remarqué, èn parlant de la
simplicité imposante des hiéroglyphes égyptiens, « que ces hiéroglyphes
©firent plutôt une absence qu’un vice d’imitation. » C est au contraire ce
vice d’imitation, ce goût pour les détails les plus minutieux, cette répétition
des formes les plus communes, qui caractérisent les peintures historiques des
Mexicains. Nous avons déjà rappelé plus haut2 qu’il ne faut pas confondre
des représentations, dans lesquelles presque tout est individualisé, avec des
hiéroglyphes simples, propres à représenter des idées abstraites. Si les Grecs,
dans ces derniers, ont puisé le sentiment du style idéal3, les peuples mexicains
ont trouvé, dans 1 emploi fréquent des peintures historiques et astrologiques,
et dans leur respect pour des formes le plus souvent bizarres et toujours
incorrectes, des obstacles invincibles au progrès des arts imitatifs. C est en
Grèce que la religion est devenue le principal soutien de ces arts auxquels
elle a donné Îa vie. L’imagination des Grecs a su répandre de la douceur
et du charme sur les objets les plus lugubres. Chez un peuple qui porte le
joug d’un culte sanguinaire, la mort se présente partout souS les emblèmes
les plus efîrayans : elle est gravée sur chaque pierre, on la trouve inscrite
sur chaque page de leurs livres les monumens religieux n’ont d’autre but
que de produire la terreur et l’épouvante.
J’ai cru devoir rappeler ces idées, avant de fixer 1 attention du lecteur
sur l’idole monstrueuse que représente la Planche x x ix . Cette roche, sculptée
• Quatremère de Quikci, sur l'idéal dans les arts du dessin, dans les Archives littéraires, i 8o5 , n.° 21,
1 Pag. i.65.
5 Quatremère de Q uikci, pag. 5o3 — 5p7-
■sur toutes ses faces , a plus de trois mitres de hauteur et deux mètres de largèur.
EUe a été trouvée sous le pavé de la Plaza Major de Mexico, dans l'enceiute
du grand temple, au mois d’août 1790, par conséquent peu de mois avant■
qpe l’on découvrît la pierre énorme qui représente les fastes et les hiéroglyphes
des jours du calendrier aztèque. Les ouvriers ï g i laisoiept des excavations pour
construire un aqueduc souterrain, la rencontrèrent dans une position horizontale,
trente-sept mètres à l'ouest du palais du vice-roi, et cinq mètres au nord de
l'Azequia de San Josef. Comme il n’est guère probable que les soldats de,
Cortez,. en enterrant les idoles pour les soustraire aux yeux des indigènes, aient
fait transporter des masses d’un poids considérable très-loin du saceUum ou elles
étaient originairement placépsi;: il est important de désigner avec précision les
endroits dans lesquels on a trouvé chaque reste de la sculpture mexicaine. Ces
notions deviendront surtout intéressantes, si un gouvernement jalouxde répandre
dés'.lumières sur l’ancienne civilisation des Américains, fait faire des fouilles
autour de la cathédrale, sur la place principale de l ’ancien Ténochtitlan, èt du
marché de Tlatelolco ■,où, dans les derniers jours du siège, les Mexicains
s’étoient retirés-avec leurs dieux pénates (Tepitotan) , avec.leurs livressacrés
rnTeoamoxtU), et avec tout ce qu’ils possédoient de plus précieux.
En jetant les yeux sur.l’idole figurée sur la Planche x x ix , telle quelle se
présente vue par devant (Fig. xÿ, par derrière (Fig. 3 ) , de côté ( Fïg. a jÇ
par dessus ’( Fig. 4 ), par dessous ( Fig. 5 ), on pourvoit d’abord être tenté
de croire que ce monument est un teotetl, pierre divine, une espèce de
fbétyle5 orné de sculptures, une roche sur laquelle sont gravés des signes
hiéroglyphiques. Mais, lorsqu’on examine de plus près cette masse informei,:
on distingue, à la partie supérieure, les têtes de deux monstres accolés; et l ’on
trouve, à chaque face ( Fig. 1 et 3 ), deux yeux et une large gueule armée de
quatre dents. Ces figures monstrueuses n’indiquent peut-être que des masques :
loar; chez les Mexicains, on était dans l’usage dé masquer les idoles à l’époque
de la maladie d’un roi4, et dans toute autre calamité publique. Les bras et
les pieds sont cachés sous une draperie entourée d’énormes serpens, et que
1 Voyez plus haut, pag. 188.
Gama , descripción de las Piedras, etc,, pag. 2.
1 Zobga, de Oie/., pag. 208.
4 Gomara, Conquista de Mexico, pag. ia 3.