•été précédée d’une intercalation de treize jours en cinquante-deux aus. Or, la
mémoire de cette ancienne méthode se sera conservée parmi les hommes, et il
se, peut que le prêtre mexicain, qui a composé le rituel du musée Borgia, ait
voulu indiquer dans son livre un artifice de calcul propre à rectifier l’ancien
calendrier, en retranchant sept jours d’une grande période de vingt cycles.
On ne pourra juger de la justesse de cette opinion, que lorsqu’un plus
grand nombre de peintures mexicaines aura été consulté en Europe et en
Amérique : car, je ne saurois le répéter assez, tout ce que nous avons appris
jusqu’ici de l’ancien état des peuples du nouveau continent, n’est rien en
comparaison des lumières qui seront répandues un jour sur cet objet, si
l’on parvient à réunir les matériaux qui sont épars dans les deux mondes,
et qui ont survécu à des siècles d’ignorance et de barbarie.
Le monument précieux que j ’ai fait représenter sur la Planche x x iii, et
qui avoit déjà été gravé à Mexico, il y a près de vingt ans, sert à confirmer
une partie des idées que nous venons de développer sur le calendrier mexicain.
Cette pierre énorme a été trouvée, au mois de décembre i y go, dans les
fondations du grand temple de MexitU, à la Plaza mayor de Mexico, à
peu près soixante-dix mètres à l’ouest de la seconde porte du palais des
vice-rois, et trente mètres au nord du marché des fleurs appelé Portai de
las Flores j à la petite profondeur de cinq décimètres. Elle étoit placée de
manière que la partie sculptée ne pouvoit être vue qu’en la mettant, dans une
position verticale. Cortez, en détruisant les temples, avoit fait briser les
idoles et tout ce qui tenoit au culte ancien. Les masses de pierre qui étoient
trop grandes pour qu’on les détruisît, furent enterrées pour les soustraire1 aux
yeux du peuple vaincu. Quoique le cercle qui renferme les hiéroglyphes des
jours n’ait que S“-,4 de diamètre, on reconnoît que la pierre -entière formoit
un parallélipipède rectangle de quatre mètres de longueur, d’autant de mètres
de largeur, et d’un mètre d’épaisseur.
La nature de cette pierre n’est pas calcaire, comme l’affirme M. Gama, mais
de porphyre trappéen gris-noirâtre, à base de wcteke basaltique. En examinant
avec soin des fragmens détachés, j’y ai reconnu de l’amphibole, beaucoup
de cristaux très-alongés de feldspath vitreux, et, ce qui est assez remarquable,
des paillettes de mica. Cette roche, fendillée et remplie de petites cavités, est
dépourvue de quarz, comme presque toutes les roches de la formation de trapp.
Comme.!« poids actuel.est encore de plus de quatre cent quatre-vingt-deux
quintaux (24,400 kilogrammes.),,et qu’aucune des montagnes qui entourent la
ville à huit ou dix.lieues de distance, n’a pu.fournir un porphyre de ce grain
et-de cette couleur, on se figure aisément les difficultés que les Mexicains, ont
éprouvées pour transporter une masse si énorme au pied du téocaUi. La sculpture
en relief, a le même fini que l ’on trouve dans.tous les .ouvrages.mexicains : les
cercles concentriques, les divisions et. les subdivisiéns sahs nombre sont tracés
avec une exactitude mathématique; plus on examine le détail de cette sculpture,
plus on y découvre ce goût pour la répétition des mêmes .formes „cet, esprit
d’ordre, ce sentiment de la symétrie qui,, chez des peuples à demi-civilisés,
remplacent le sentiment du beau.
Au centre de la pierre se présente- le fameux signe nahui oUin Tonatiuh
(le soleil dans/ses quatre mouvemens)dont nous avons parlé,plus.haut'. Huit
rayons, triangulaires entourent le soleil ces rayons se retrouvent dans le
calendrier rituel, tonalamatl, dans les peintures historiques, partout où est
figuré le soleil, Tonatiuh Le nombre huit fait, allusion à la division du jour,
et ¿dé la- nuit en huit, partiess. Le dieu Tonatiuh est représenté ouvrant une
large bouche armée de dents : cette bouche ouverte, . cette langue qui en
sort., rappellent la figure d’une divinité de l ’Hindoustân, celle de Kdla, le
Temps. D’après un passage du Bhagavat-guita, « Kdla engloutit les mondes,
ouvrant une bouche enflammée, armée d’une .rangée, de . terribles dents,
et montrant .une. langue énorme4. . Tonati'uh, placé. au milieu des signes
des jours, mesurant l’année par les quatre mouvemens des solstices et des
équinoxes, est en effet le.véritable symbole du Temps: c’est Kriehna prenant
la forme de Kdla, c’est Kronos qui dévore ses .enfans, et que nous croyons
reconnoître sous le nom de Moloch chez les Phéniciens.
Le cercle intérieur offre les vingt signes des jours : en se souvenant, que
cipactU est le premier, et xochitl le dernier de ces catastérismesr on. voit
qu ici, comme partout ailleurs, les Mexicains ont rangé les hiéroglyphes de droite
à gauche. Les têtes des animaux sont placées dans une direction opposée,
■ Pag.
* PL x v , n. 4- ( Cod. Borg. VeUtr., fol. 4g.)
5 Voyez plus haut, pag. 128.
4 Tr«duction de M. Wilkins. Voyez aussi The Hindu Panthéon, art. Kâla.