V U E S 'D E S C O R D IL L E R E S ,
feu ou masse fondue qui bouillonne, étoit regardé comme un mauvais
esprit. Il voyageoit par l’air, entre Tùnja et Sogamozo, et transformoit les
hommes en serpens, en lézards et en tigres. Selon d’autres traditions, Fomagata
étoit originairement un prince cruel. Pour assurer la succession à son: frère,
Tusatua, Bochica l’avoit fait traiter, la nuit de ses noces, comme üranus l’avoit
été par Saturne. Nous ignorons quelle constellation portait le nom de ce
fantôme- mais M. Duquesne croit qufe les Indiens y attaehoient- le souvenir
confus de l ’apparition d’une comète. Lorsque la procession, qui rappelle les
processions astrologiques' des Chinois et celle de la fête d’Isis, étoit arrivée
à l’extrémité du suna,'on'liait la victime à la colonne dont nous avons fait
mention plus haut : une nuée de flèches la couvrait, èt on lui arrachoit le
coeur pour en faire offrande au Roi Soleil, à Bochica. Le sang du guesa
étoit recueilli dans des vases sabrés. Cette oérémonie barbare présente des
rapports frappans avec celle que les Mexicains célébraient à la fin de
leur grand cycle, de cinquante-deux ans, et que Ion trouve figurée sur la
Planche XV *.
Les Indiens Muyscas gravoient sur des pierres les signes qui présidoient
aux années, aux lunes et aux jours lunaires. Ces pierres, cômme nous l’avons
dit plus haut, rappeloient aux prêtres, xeques, dans quel zocam ou année
muysea telle ou telle lune devient intercalaire. La pierre de petrosilex,
représentéé en projection orthographique, figure i , én perspective et dans
ses vraies dimensions, figure 2, paraît indiquer les mois embolismiques de la
prèmière indiction du cycle. Elle est pentagone, parce'que cette indiction
renferme cinq années ecclésiastiques de trente-sept lunes chacune : elle offre
neuf signes, parce que cinq fois trente-sept lunes sont ContenUés en neuf
années muyscas. Pour bien saisir l’explication que M. Duquesne donne de
ces signes, il faut se rappeler d’abord que, par l’emploi des séries périodiques,
dans une indiction de neuf années et cinq mois muyscas, les mois intercalés
tombent successivement sur cuhupqua, muyhica, ata, suhuza et hisca, et
qu’aucune intercalation ne peut avoir lieu dans la première, la troisième, la
septième et la neuvième année. Ces coïncidences sont rendues sensibles par les
trois cercles concentriques qu’offre la troisième figure. Le premier cercle, qui est
■ Souciet, Tom. n i, pag.
’ Voyez plus haut, pag.
l’intérieur, indique les. signes des .lunes ou sunas; le second cercle, celui du
milieu, rgppejle en.quelleannée muysea, de vingt sunas, un des signes contenu
dans la série de dix termes devient intercalaire; enfin, le cercle, extérieur
détermine^¡nombre, des . int,ercalations qui ont lieu en trente-sept ans.
Par exemple, si l’on demande dans quel zocam est intercalé le signe bosa, on
trouve que cette intercalation est la sixième, et quelle se fait dans la douzième
année du cycle.
M. Duquesne, guidé par des Indiens qui ont conservé une connoissance
des signes du calendrier muysea, croit reconnoître sur trais faces de la pierre
les intercalations, à'ata, de suhuza et de hisca, c’est-à-dire.celles qui ont lieu
dans neuf années de douze et treize stinas qui correspondent à la sixième à la
huitième et à la dixième.année muysea, de vingt sunas. J’ignore pourquoi les
deux premières intercalations, celles de cuhupqua et muyhica, n’y sont pas
marquées. Voici l’interprétation, souvent un peu arbitraire, des fig. i et 2.
La grenouille sans tête, a , rappelle que Tindiction commence par le
signe ata, emblème de l ’eau. En h, c et d, sont sculptées trois petites
pièces de bois, dont chacune est marquée de trois lignes transversales. Celle
du milieu ne se trouve pas sur la même rangée avec les autres, pour indiquer
qu’il ne. s’agit que de six années muyscas, après lesquelles l’intercalation tombe
sur.quihichata, e , têtard de grenouille muni d’une longue queue et dépourvu
de pattes, grenouille en repos, Cet emblème annonce que le mois auquel l’animal
préside est inutile, et. ne compte pas dans les douze sunas qui s’écoulent
dune, récolte a. une. autre. Les deux figures de la grenouille, a et e , sont
placées sur une sorte, de plateau quadrangulaire. On pourrait douter de
1 interprétation de 1 hiéroglyphe e , mais M. Duquesne affirme avoir observé
dans plusieurs idoles de jade- le même symbole astrologique d’une lune
intercalaire. Dana ces idoles, 1 animal sans pattes étoit couvert de la tunique
indienne ( capisayo ) qui est encore usitée parmi le bas-peuple. On se rappelle
que, chez, les Aztèques, les signes des jours avoient même leurs autels *. Les
figures f et h indiquent, par huit lignes transversales disposées-par cinq et par
trois , qu’à la huitième, année muy.sc.a on intercale la lune présidée par suhuza.
C est ce signe qui est représenté en i par un cercle tracé, au moyen d’une
corde, autour d’une colonne. Les Indiens assurent que f et h représentent des
1 Voyez plus haut, pag. 220.