les Mexicains désignoient sous le nom de cohuatlicuye , vêtement de serpens.
Tous ces accessoires, surtout les franges en forme de plumes, sont sculptés
avec le plus grand soin. M. Gama, dans un mémoire particulier, a rendu
très - probable que cette idole représente ( Fig. 3 ) le dieu de la guerre,
Huitzilopochtli, ou Tlacahuepancuexcotzinet (Fig. i ) sa femme, appelée
Teoyamiqui1 (de miquij mourir, et de te o y a o guerre divine), parce qu’elle
conduisoit les ames des guerriers morts pour la défense des dieux, à la maison
du Soleilj le paradis des Mexicains“, où elle les transformoit en colibris. Les
têtes de morts et les mains coupées, dont quatre entourent le sein de la déesse,
rappellent les horribles sacrifices ( teoquauhquetzoliztli ) célébrés dans la
quinzième période de treize jours, après le solstice d’été, à l’honneur du dieu
de la guerre et de sa compagne Teoyamiqui. Les mains coupées alternent avec
la figure de certains vases dans lesquels on brûloit l’encens. Ces vases étoient
appelés top-xicalli} sacs enjbrme de calebasse (de toptlij bourse tissue de
fil de pite, et de xicalli, calebasse).
Cette idole étant sculptée sur toutes ses faces, même par dessous (Fig. 5 ),
où l’on voit représenté Mictlanteuhtli , le seigneur du lieu des morts j on ne
sauroit douter qu’elle étoit soutenue en l’air au moyen de deux colonnes, sur
lesquelles reposoient les parties marquées a et b , dans les figures i et 3.
D’après cette disposition bizarre, la tête de l’idole se trouvoit vraisemblablement
élevée de cinq à six mètres au-dessus du pavé du temple, de manière que les
prêtres (Teopixqui) traînoient les malheureuses victimes à l’autel, en les faisant
passer au-dessous de la figure de Mictlanteuhtli.
Le vice-roi, comte de Revillagigedo, a fait transporter ce monument à
l’édifice de l’Université de Mexico, qu’il a regardé « comme 1 endroit le plus
propre pour conserver un des restes les plus curieux de l’antiquité américaine3, »
Les professeurs de cette Université, religieux de l’ordre de Saint-Dominique,
n’ont pas voulu exposer cette idole aux yeux de la jeunesse mexicaine; ils
l’ont enterrée de nouveau dans un des corridors du collège, à une profondeur
d’un demi-mètre. Je n’aurois pas été assez heureux pour pouvoir 1 examiner, si
l’évêque de Monterey, Don Feliciano Marin, qui passa par Mexico pour se
1 Botühihi, Idea de una nucva Hisloria général, pag. 27 et 66.
* Torqcbmada, Lib. xn i, c. 48 (Tom. 11, pag. 56g ) . -
i Officia del 5 sept. 1790.
rendre dans son diocèse, n’avoit pas, à ma prière, engagé le recteur de
1 Université .à la faire déterrer. J'ai trouvé très-exact le. dessin de M. Gama,
que j'ai fait copier sur la Planche xjsix. La pierre qui a /servi, à ce monument,
est une wakke basaltique gris bleuâtre, fendillée et remplie de feldspath
vitreux.
Les mêmes fouilles auxquelles nous devons les sculptures représentées
Planches x x i , s im et x x ix , ont aussi fait découvrir, au mois de janvier i 7Sh
un tombeau de deux mètres de longueur sur un mètre de largeur, rempli
de sable très-fin, et renfermant un squelette bien conservé duo quadrupède
carnassier. Le tombeau étoit carré et formé de dalles d'amjgdaloïde poreuse,
appelée tezontle. L ’animal paroissoit un coyote ou loup mexicain. Des vases
d'argile et des grelots de bronze très-bien fondus se trouvoient placés à côté
des ossemens. Ce tombeau étoit sans doute celui de quelque animal sacré;
car. les écrivains du seizième siècle nous apprennent que les Mexicains
érigeoient de petites chapelles au loup, charitico; au tigre, tlatocaoçetotl;
à l’aigle, quetzalhuexolocjuauhtU. et . à la couleuvre. Le cou, ou sacellum
du chantico, s’appeloit tetlanman ; et, qui plus est, les prêtres du loup sacré
formoient une congrégation particulière, dont le couvent portait le.nom de
Tetlacmancalmecaç *.
Il est facile de concevoir comment les divisions des zodiaques, et les noms
des signes qui président aux jours, aux demi-lunaisons et aux années,, ont
pu conduire les hommes au culte des animaux. Les peuples nomades comptent
par lunaisons; ils distinguent la lune des lapins, celle des tigres, celle des
chèvres, etc., selon qu’à différentes époques de l’année les animaux sauvages
ou domestiques leur offrent des jouissances, ou leur inspirent des craintes.
Lorsque peu à peu les mesures du temps deviennent des mesures de l’espace“,
et que les peuples forment la dodécatomérie du zodiaque des pleines lunes j
les noms des animaux sauvages et domestiques passent aux constellations
mêmes. C est ainsi que le zodiaque tartare, qui ne renferme que de vrais
Çaéia, peut être considéré comme le, zodiaque des peuples chasseurs et pasteurs.
Le tigre, inconnu à l’Afrique, lui donne un caractère exclusivement asiatique.
■ Nierbmbbrg, Hist. naU, Lib. v in , c. 22, pag. 144. Torqdeuada, Lib. n , c. 58; Lib. v in, c. i 3
(Tom 1 , pag. 194, Tom. n , pag. 29). _ '
* Voyez plus haut, pag. 174. '