cette colline faisoit partie des jardins qui entouroient l’ancienne forteresse
péruvienne. Nous reconnûmes ici, comme près du ravin du soleil, un grand
nombre de petits sentiers creusés par la main de l’homme sur la pente d’un
rocher qui est à peine couvert de terre végétale.
Près de Mexico, dans les jardins de Chapoltepeo, le voyageur européen
contemple avec intérêt des cyprès * dont les troncs ont plus de seize mètres
de circonférence, et que l’on croit, avec quelque probabilité, avoir été
plantés par les rois de la dynastie aztèque. Dans les jardins de l ’Inca, près
du Canar, nous avons cherché vainement quelque arbre dont l’âge parût
remonter à un demi-siècle : rien n’annonce le séjour des Incas dans ces
contrées, sinon un petit monument de pierre placé au bord d’un précipice,
et sur la destination duquel les habitans du pays ne sont pas d’accord.
Ce petit monument, que l’on appelle le jeu de VInca3 consiste en une
seule masse de pierres. Les Péruviens ont employé, pour le construire, le même
artifice que les Égyptiens pour sculpter le Sphinx de Djyzeh, dont Pline dit
expressément : «e saxo naturali elaborata.» Le rocher de grès quartzeux qui
lui. sert de base a été diminué, de manière qu’après avoir enlevé les couches
qui en formoient le sommet, il n’en est resté qu’un siège entouré d’une
enceinte , que l’on trouve représenté sur cette Planche. On doit être surpris
quun peuple qui entassoit un nombre prodigieux de pierres taillées dans la
belle chaussée de l’Assuay, ait eu recours à un moyen aussi bizarre pour
élever un mur dun mètre de hauteur. Tous les ouvrages péruviens portent
le caractère d un peuple laborieux, qui aime à creuser le ro c, qui cherche
les difficultés pour montrer son adresse à les vaincre, et qui imprime aux
édifices les plus chétifs un caractère de solidité d’après lequel on pourroit
croire qu’à une autre époque il eût élevé des monumens plus considérables.
L Inga-Chungana, vu de loin , ressemble à un canapé dont le dos est
orné d une sorte d’arabesque en forme de chaîne. En entrant dans l ’enceinte
ovale, on voit qu’il n’y a de siège que pour une seule personne, mais que
cette personne est placée d’une manière très-commode, et qu’elle jouit de la
vue la plus délicieuse sur le fond de la vallée de Gulan. Une petite rivière
serpente dans cette vallée, et forme plusieurs cascades dont on aperçoit l’écume
a travers des touffes de gunnera et de melastomes. Ce siège rustique orneroit
1 Cupressus disticha, L.
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