le temps et qui subdivisent les saisons, peuvent être inventés chez des peuples
qui ne fixent point leur attention sur les étoiles. On auroit pu trouver un
véritable zodiaque composé de douze signes qui président aux mois, et, par
l’artifice des séries périodiques, aux années, aux jours et aux heures., dans
la région basse du Pérou, là même où une couche épaisse de vapeurs dérobe
aux habitans la vue des étoiles, sans leur cacher les disques de la lune et du
soleil. Les signes du zodiaque idéal, dont la révolution complète ( le cercle,
annidus) forme une année, ( annus, svmvroç), passent facilement aux constellations
mêmes : dès-lors, la division du temps devient une division de l espace.
Nous ne discuterons point si le zodiaque des Hindoux, des Chaldéens,
des Égyptiens et des Grecs, n’a point aussi été originairement un cycle ,
dont les signes désignoient les variations du climat dans un pays sujet à des
inondations périodiques. L’inégale étendue qu’occupent la vierge et le cancer,
et le manque de liaison2 que l’on observe entre les figures des dodécatémorions
et les constellations extrazodiacàles, semblent donner quelque probabilité
à cette supposition. Nous voyons, en effet, qu’il est des peuples qui emploient
à la fois plusieurs divisions de l ’écliptique, et que les signes qui, chez une
nation, appartiennent à des constellations, ne sont chez une autre que des
divisions du temps. Peut-être existoit-il jadis quelque région de lAsie dans
laquelle le cycle tartare des animaux célestes que Bailly regarde comme le
plus ancien des zodiaques, tandis que Dupuis3 s efforce à le faire passer
pour une table des paranatellons, étoit une division réelle des étoiles placées
dans l ’écliptique. Pour bien saisir les rapports qui, dès les temps les plus reculés,
se sont formés entre les peuples des deux continens, il ne faut pas perdre
de vue la liaison intime qui existe entre le zodiaque imaginaire et le zodiaque
réel, entre les cycles et les constellations de l’écliptique, entre les mansions
et les divisions de l ’orbite solaire.
Ce sont ces mêmes considérations sur le développement progressif de
l’astrognosie, qui nous empêchent de décider si les hiéroglyphes des jours
et des années du calendrier toltèque et aztèque, comme les tse et les tchi
chinois, n’appartiennent qu’à un zodiaque imaginaire ou fictif, ou s’ils désignent
' Rhode, Versùch ùber das Aller des Thierkreises, 1809, S. i 5 et 101.
* Recherches sur l ’origine des constellations de la sphère grecque, 1807, pag. 63.
5 Origine des cultes, Tom. n i, pag. 362.
des constellations zodiacales. Nous avons déjà observé plus haut que les grandes
roues qui représentent le cycle de ciùquante-deux ans, ètoient entourées
d’un serpent qui se mordoit la queue, et dont les quatre replis marquoient
les quatre indictions. Les hiéroglyphes étant disposés par séries périodiques
de quatre termes , et les intervalles qui séparent un repli de l’autre renfermant
douze années, chaque noeud du serpent correspondoit à un autre signe. Je pense:
que ces quatre noeuds, désignés par les catastérismes lapin, canne, silex et
maison, faisoient allusion aux points des solstices et des équinoxes, ou à
l’intersection des colures avec l’écliptique. La plus ancienne division du zodiaque,
dit Albategnius', est celle en quatre parties. En effet, dans la première année
du grand; cycle des jours, mathctli tochtli { 10 lapin), chicuei acatl (8 canne),
chicome calli % maison), et matlactli tecpactl ( n silex), répondoient aux
22 décembre, 22 mars, 20 juin et 23 sèptembre. Ces jours s’éloignent très-peu
des équinoxes et des solstices; et, comme l ’année mexicaine commençoit au
solstice d hiver, de-même que 1 année des Chinois, il est assez naturel que,
dans la série périodique des signes des années, le premier terme soit tochtli,
quoique, dans la série des vingt signes des jours, tochtli soit précédé par caüi.
Nous savons, en outre, par les notions que Siguenza a puisées dans les
ouvrages d’Ixtlilxochitl, que les quatre replis du serpent et les quatre catastérismes
qui leur appartiennent indiquoient les quatre saisons, les quatre élémens
et les points cardinaux; La terre étoit dédiée au lapin, et l ’eau à la canne; en
traitant plus. haut des signes de la nuit, nous avons vu que Tepeyollotli,
une des divinités qui habitent les cavernes, et Cinteotl, la déesse des moissons,
accompagnent les signes diurnes lapin et canne. Le sens de ces allégories est
trop clair pour qu’elles aient besoin d’explication. Les quatre signes des équinoxes
et des solstices, choisis dans une série d^ vingt signes, rappellent en outre les
quatre étoiles royales, Aldebaran, Regulus, Antares et Fomahault, célèbres
dans toute l ’Asie, et présidant aux saisons2. Dans le nouveau continent, les
indictions du cycle de cinquante - deux ans forment,- pour ainsi dire, les
quatre saisons de la grande année, et les astrologues mexicains se'plaisoient à
voir présider chaque période de treize ans par un des quatre signes équinoxiaux
ou solsticiaux.
1 De scientia stellarum, cap. 2 ( ed. Sonon.y i 645, pag. 5.)
* Lib. vi, c. 1.