Quoique, dans toutes les parties de l’Empire mexicain, on se servît des
mêmes signes, et qu’on les rangeât dans le même ordre, on observe cependant
quelque différence dans le choix du signe solsticial et équinoxial placé à la tête
du xiuhmolpillij ou ligature des années. Les habitans de Tezcuco commençoient
la grande aimée par acatl; ceux de Téotihuacan, par caUi; les Toltèques , par
tecpatl. On a révoqué en doute si, chez ces mêmes peuples, malgré la différence
que nous venons d’indiquer, le premier jour de l’an eût constamment
le signe cipactli : mais les fragmens de leurs annales historiques, conservés
dans le musée de Boturini et dans la collection du père Pichardo, à Mexico,
semblent indiquer que la variété des dates provient de l’époque à laquelle
se faisoit l’intercalation des treize jours, et non de la différente manière de
marquer le commencement du cycle.
Nous ignorons si les vingt signes des jours mexicains sont les restes
d’une ancienne division du zodiaque en vingt-huit mansions lunaires, ou si,
avec les quatre signes de la nuit, dont les noms ne se retrouvent pas parmi
ceux des jours, ils ont formé anciennement vingt-quatre catastérismes, comme
les tsieki du zodiaque chinois. Peut-être avoit-on placé entre les quatre signes
équinoxiaux et solsticiaux un nombre égal de signes ; peut-être le nombre de
vingt ne dérive-t-il que d’une division de l’hémisphère visible en dix parties.
Il est certain que cette même division a engagé les Mexicains à partager en
dix-huit mois l’année de trois cent soixante jours, et qu’elle est devenue la
base d’un système dont nous ne trouvons aucun vestige dans l’ancien continent.
J’incline à croire cependant que la division en dix-huit mois de vingt jours
est postérieure à une autre en douze lunes de trente jours; car la méthode
de faire présider chaque jour par un signe du zodiaque, et de déterminer
le nombre des mois par le retour des séries périodiques, a dû se présenter
plus tard que l’idée plus simple de diviser l’année d’après le nombre des
lunaisons qu’elle renferme. Quoiqu’en Asie il existe des divisions de l’écliptique
en vingt-quatre tsielùs1 et en trente-six decans, ces divisions n’y ont pourtant
pâs donné lieu à des années de dix ou de quinze mois ; et si l’antiquité nous en
offre de quatre, de six ou de vingt-quatre mois, ces divisions ne tiennent
pas à l’usage des séries périodiques , comme les dix-huit mois de l’année
1 àmiot, dans les Mémoires concernant les Chinois, Vol. u , pag. 161. Gaubil, Traité de l’Astronomie-
chinoise, pag. 32.
E T MONUMENS D E L ’AM E R IQ U E .
mexicaine, mais à l ’importance attachée aux points équinoxiaux et solsticiaux,
aux cycles de soixante jours,: et à;h» durée dçs démi-lnnaisons.
Nous avons rappelé plus haut que l’année’mexicaine, comme celle .des
Égyptiens et des Perses, étoit composée de trois cent soixante jou|%auxquels
on ajoutait cinq jours épagomènes fbrtifs (mwteraka), ou inutiles („emontom}.
Si lés. Mexicains havoient pas. connu l’excès de la durée'.d’ilrré révolution du
soleil sur trois cent soixante-cinq jours, le commencemenhde leur année, comme
celui de Tannée vaguèfcdes Égyptiens, auroit .passé, à peu près en quatorze
cent, soixante ans, par toutes les saisons ou par «us les. points de l’écliptiquè;
Quatre, sièclés s’étaient écoulés depuis la réforme du calendrier mexicain;
en i ô 9 i , jusqu’à l'arrivée des Espagnols. Les écrivains de ce temps affirment
toWv qu’à ’ cette ép o q u e ,* calendrier des Européens coïncidoit, à peu de
•jours près, aveq M calendrier aztèque : le calcul exact des écIipses-de’-soleU
marquées dans les annales mexicaines, a même rendu probable que la dilïerènce
observéè. entre les deux calendriers provenoit en entier de C e que le nôtre
n'avoit pas encore subi la correction grégorienne. Examinons maintenant quel
étoit le mode d’intercalation par lequel-les Mexicains parvenoient à éviter leV
erreurs de. leur chronologie.
L ’année mexicaine étant solaire et non lunaire, le mode d’intercalation
pouvoit être d’uné bien plus grande simplicité qfie celui employé par les
Grecs et les Romains, avant l'introduction du MerkidinusJ En jetant un coup
d’oeil général sur les intercalations usitées chez différées peuples , nous voyons
que les uns laissent s’accumuler les heures ju sq u * ce qu'elles forment un
jour entier, tandis que d’autres négligent l ’intercalation jusqu% cè que j j j
heures excédantes forment une périod'e qui égale une des grandes divisions
de leur année. Le premier mode d’intercalation est celui de l ’année julienne;
le second est celui des anciens Perses, qui ajoutaient tous les cent vingt ans,
à une année de douze mois, un mois entier de trente jours, et de manière
que le mois intercalaire parcourût toute l ’année en 12 x 120,.ou-quatorze
cent quarante ans *. Les Mexicains ont évidemmènt suivi le système des Perses :
ils conservoient 1 année vague jusqu’à ce que les heures éxcédantes formassent
une demi-lunaison ; ils intercaloient, par conséquent, treize jours toutes les
ligatures ou cycles de cinquante-deux ans. Il en résultoit, comme nous l ’avons
observé plus haut, que chaque ligature renfermoit ^ ou quatorze cent
1 Idblbr, Hist. Unters., S. 37g.