15 6 H i s t o i r e N a t u r e l l e .
un nombre de vingt-huit chiffres, celle du ver fperma-
tique de la quatrième génération fera exprimée par un
nombre de trente-fept chiffres, celle du ver fpermatique
de la cinquième génération par un nombre de quarante-
fix chiffres, & celle du ver fpermatique de la fixième
génération par un nombre de cinquante-cinq chiffres.
Pour nous former une idée de la petiteffe repréfentée par
cette fradtion, prenons les dimenfions de la fphère de
l ’Univers depuis le Soleil jufqu’à Saturne, en fuppofànt le
Soleil un million de fois plus gros que la terre & éloigné
de Saturne de mille fois le diamètre folaire ; nous trouverons
qu’il ne faut que quarante-cinq chiffres pour exprimer
le nombre des lignes cubiques contenues dans cette
fphère, & en réduifant chaque ligne cubique en mille
millions d’atomes , il ne faut que cinquante-quatre
chiffres pour en exprimer le nombre ; par conféquent
l ’homme ferait plus grand par rapport au ver fpermatique
de la fixième génération, que la fphère de l ’Univers n el’eft
par rapport au plus petit atome de matière qu’il foit pof-
fible d’apercevoir au microfcope. Que fera - ce fî on
pouffe ce calcul feulement à la dixième génération l
la petiteffe fera fi grande que nous n’aurons aucfin
moyen de la faire fentir ; il me femble que fa vrai-fem-
blance de cette opinion difparoît à mefure que l’objet
s’évanouit. C e calcul peut s’appliquer aux oeufs comme
aux vers fpermatiques, & le défaut de vrai-femblance eft
commun aux deux fÿftèmes : on dira fans doute que la
matière étant divifible à l’infini il n’y a point d’impoffibilité
dans cette dégradation de grandeur , & que quoiqu’elle
ne foit pas vrai-femblable, parce qu’elle s’éloigne
trop de ce que notre imagination nous repréfente ordinairement
, on doit cependant regarder comme poffiblecette
divifion de la matière à l’infini, puifque par la penfée on
peut toujours divifer en plufieurs parties un atome, quelque
petit que nous lefuppofions. Maisjeréponds qu’on fe fait
fur cettedivifibilitéà l ’infini la même illufion que furtoutes
les autres efpèces d’infinis géométriques ou arithmétiques :
ces infinis ne font tous que des abftraélions de notre efprit
& n’exiftent pas dans la nature des chofes ; & fi l’on veut
regarder la divifibilité de la matière à l ’infini comme un
infini abfolu,iI eft encore plusaifé de démontrer qu’elle
ne peut exifter dans ce fens; car fi une fois nous fuppo-
fons le plus petit atome poffible, par notre fuppofition
même cet atome fera nécefîàirement indivifible, puifque
s’il étoit divifible ce ne ferait pas le plus petit atome poffible,
ce qui ferait contraire à la fuppofition. Il me paraît
donc que toute hypothèfe où l’on admet un progrès à l’infini,
doit être rejetée, non feulement comme fauffe, mais
encore comme dénuée de toute vrai-femblance ; & comme
le fyftème des oeufs & celui des vers fpermatiques fuppo-
fent ce progrès, on ne doit pas les admettre.
Une autre grande difficulté qu’on peut faire contre ces
deux fÿftèmes, c ’eft que dans celui des oeufs, la première
femme contenoit des oeufs mâles & des oeufs femelles; que
les oeufs mâles ne contenoient pas d’autres oeufs mâles,
ou plutôt ne contenoient qu’une génération de mâles, &
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