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plus <ie nourriture réelle, plus de cette matière organique
& productive dont nous avons tant parié, & qui lorf-
qu’elle n’eft pas digérée par i’eltomac de l’enfant pour
fervir à la nutrition & à l ’accroiflement de fon corps,
prend, par l’aélivité qui lui ell effentielle, d’autres formes,
& produit des êtres animez, des vers en fi grande quantité
que l ’enfant elf louvent en danger d’en périr. En permettant
aux enfans de boire de temps en temps un peu de
v in , on préviendrait peut - être une partie des mauvais
effets que caufent les vers ; car les liqueurs fermentées
s’oppofent à leur génération, elles contiennent fort peu
de parties organiques & nutritives, & c ’eft principalement
par fon aétion lur les folides, que le vin donne des
forces, il nourrit moins le corps qu’ il ne le fortifie ; au
relie la plupart des enfans aiment le v in , ou du moins
s’accoûtument fort aifément à en boire.
Quelque délicat que l ’on foit dans l’enfànce, on ell à
cet âge moins fenfible au froid que dans tous les autres
temps de la vie ; la chaleur intérieure ell apparemment
plus grande, on fçait que le pouls des enfans ell bien plus
fréquent que celui des adultes, cela feul fulfiroit pour
faire penfer que la chaleur intérieure ell plus grande dans
la même proportion, & l’on ne peut guère douter que
les petits animaux n’aient plus de chaleur que les grands
par cette même raifon, car la fréquence du battement du
coeur & des artères ell d’autant plus grande que l’animal
ell plus petit ; cela s’obferve dans les différentes efpèces,
aulfi-bien que dans la même efpèce ; Je pouls d’un enfant
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ou d’un homme de petite llature ell plus fréquent que
celui d’une perfonne adulte ou d’un homme de haute
taille; le poufs d’un boeuf ell plus lent que celui d’un
homme, celui d’un chien ell plus fréquent, & les batte-
mens du coeur d’un animal encore plus petit, comme
d’un moineau, fe fuccèdent li. promptement qu’à peine
peut-on les compter.
La vie de l ’enfant ell fort chancelante jufqu’à 1 âge
de trois ans, mais dans les dfux ou trois années fuivantes
elle s’alfure, & l’enfant de fix ou fept ans ell plus affuré
de vivre, qu’on ne l’elt à tout autre âge : en confultant
les nouvelles tables * qu’on a faites à Londres fur les
degrés de la mortalité du genre «humain dans les dif-
férens â g e s , il paraît que d’un certain nombre d’enfans
nez en même temps, il en meurt plus d’un quart dans la
première année, plus d’un tiers en deux ans, & au moins
la moitié dans les trois premières années. Si ce calcul étoit
julle on pourrait donc parier l ’orfqu’un enfant vient au
monde, qu’il ne vivra que trois ans, obfervation bien trille
pour l ’elpèce humaine ; car on croit vulgairement qu’un
homme qui meurt à vingt-cinq ans , doit être plaint fur là
dellinée & fur le peu de durée de là v ie , tandis que
fuivantees tables la moitié du genre humain devrait périr
avant l ’âge de trois ans, par conféquent tous les hommes
qui ont vécu plus de trois ans, loin de fe plaindre de leur
fo r t, devraient fe regarder comme traitez plus favorablement
que les autres par le Créateur. Mais cette mortalité
* Voyez les Tables de M. Simpfon, publiées à Londres en 1742,