3 2 H i s t o ir e Na t u r e l l e .
lorfqu’après avoir parcouru toutes les manières d’engendrer
fon femblabie, nous aurons remarqué que toutes
ces hifloires de la génération, accompagnées même des
obfervations les plus exaétes, nous apprennent feulement
les faits fans nous indiquer les caufes, & que les moyens
apparens dont la Nature fe fert pour la reproduction, ne
nous paroilfent avoir aucun rapport avec les effets qui en
réfultent, nous ferons obligez de changer la queflion, &
nous ferons réduits a demander, quel efl donc le moyen
caché que la Nature peut employer pour la reproduétion
des êtres î
Cette queflion, qui eftla vraie, efl, comme l ’on voit,
bien différente de la première & de la fécondé, elle
permet de chercher & d’imaginer, & dès-lors elle n’eft
pas infolubie, car elle ne tient pas immédiatement à une
caufe generale ; elle n efl pas non plus une pure queflion
de fait, & pourvû qu’on piaffe concevoir un moyen de
reproduétion, l’on y aura fatisfait, feulement il efl nécef-
faire que ce moyen qu’on imaginera, dépende des caufes
principales, ou du moins qu’il n’y répugne pas, & plus il
aura de rapports avec les autres effets de la Nature, mieux
il fera fondé.
Par la queflion même il efl donc permis de faire des
hypothefes & de choifir celle qui nous paraîtra avoir le
plus d’analogie avec les autres phénomènes de la Nature;
mais il faut exclurre du nombre de celles que nous pourrions
employer, toutes celles quifuppofent la chofe faite,
par exemple, celle par laquelle on fuppoferoit que dans
le premier
le premier germe tous les germes de la meme efpece
étoient contenus, ou bien qu’à chaque reproduélion il
y a une nouvelle création, que c ’eft un effet immédiat
delà volonté de Dieu, & cela, parce que ces hypothèfes
fe réduifent à des queflions de fait, dont il n’eft pas pof-
fible de trouver les raifons : il faut auffi rejeter toutes les
hypothèfes qui auraient pour objet les caufes finales,
comme celles où l ’on dirait que la reproduétion fe fait
pour que le vivant remplace le mort, pour que la terre
foit toujours également couverte de végétaux & peuplée
d ’animaux, pour que l ’homme trouve abondamment fà
fubfiftance, &c. parce que ces hypothèfes, au lieu de
rouler fur les caufes phyfiques de l’effet qu’on cherche
à expliquer, ne portent que fur des rapports arbitraires
& fur des convenances morales; en même temps il faut
fe défier de ces axiomes abfolus, de ces proverbes de
phyfique que tant de gens ont mal-à-propos employez
comme principes, par exemple, il ne fe fait point de fécondation
hors du corps, nullafcecundatio extra corpus,
tout vivant vient d’un oeuf, toute génération fuppofe des
sèxes, &c. il ne faut jamais prendre ces maximes dans un
fens abfolu, & il faut penfer qu’elles fignifient feulement
que cela efl ordinairement de cette façon plûtôt que d’une
autre.
Cherchons donc une hypothèfe qui n’ait aucun des
défauts dont nous venons de parler, & par laquelle on
ne puiffe tomber dans aucun des inconvéniens que nous
venons d’expofer; & fi nous ne réuffiffons pas à expliquer
Tome I I , E