62 H i s toir e Na t u r e l l e .
des phénomènes que nous fçavons qu’elles produifent!
pourquoi veut-on fe réduire à n’employer que la force
d ’impulfion î n’eft-ce pas vouloir juger du tableau par le
toucher i n’eft-ce pas vouloir expliquer les phénomènes
de la maffe par ceux de la furface , la force pénétrante
par l’aétion fuperficielie ! n’eft-ce pas vouloir fe fervir
d’un fens, tandis que c ’eft un autre qu’il faut employer!
n’e ft-ce pas enfin borner volontairement fa faculté de
raifonner fur autre chofe que fur les effets qui dépendent
de ce petit nombre de principes méchaniques auxquels
on s’eft réduit.
Mais ces forces étant une fois admifes, n’eft-il pas
très-naturel d’imaginer que les parties les plus analogues
feront celles qui fe réuniront & fe lieront enfemble intimement;
que chaque partie du corps s’appropriera les
molécules les plus convenables, & que du fuperflu de
toutes ces molécules il fe formera une matière féminale
qui contiendra réellement toutes les molécules néceflaires
pour former un petit corps organifé, femblable en tout
à celui dont cette matière féminale eft l’extrait! une force
toute femblable à celle qui étoit néceflaire pour les faire
pénétrer dans chaque partie & produire le développement,
ne fuffit-elle pas pour opérer la réunion de ces molécules
organiques, & les affembler en effet en forme organifée
& femblable à celle du corps dont elles font extraites !
Je conçois donc que dans les alimens que nous prenons
il y a une grande quantité de molécules organiques, &
cela n’a pas befoin d’être prouvé, puifque nous ne vivons
que d’animaux ou de végétaux, lefquels font des êtres
organifez : je vois que dans l’eftomac & les inteftins il fe
fait une féparation des parties groflières & brutes qui font
rejetées par les voies excrétoires ; le chyle que je regarde
comme l’aliment divifé, & dont la dépuration eft commencée,
entre dans les veines laélées, & de-là eft porté
dans le fang avec lequel il fè mêle ; le fang tranfporte ce
chyle dans toutes les parties du corps, il continue à fe
dépurer par le mouvement de la circulation de tout ce
qui lui reftoit de molécules non organiques ; cette matière
brute & étrangère eft chaffée par ce mouvement, & fort
par les voies des fécrétions & de la tranfpiration, mais les
molécules organiques reftent, parce qu’en effet elles font
analogues au fang, & que dès-lors il y a une force d’affinité
qui les retient. Enfuite, comme toute la maffe du
fang paffe plufieurs fois dans toute l’habitude du corps,
je conçois que dans ce mouvement de circulation continuelle
chaque partie du corps attire à foi les molécules
les plus analogues , & laide aller celles qui le font le
moins ; de cette façon toutes les parties fe développent
& fe nourriffent, non pas, comme on le dit ordinairement,
par une Ample addition de parties & par une augmentation
fuperficielie, mais par une pénétration intime, produite
par une force qui agit dans tous les points de la maffe;
& lorfque les parties du corps font au point de développement
néceflaire, & qu’elles font prefque entièrement
remplies de ces molécules analogues, comme leur fubf-
tance eft devenue plus folide, je conçois qu’elles perdent