2 H i s toir e Na t u r e l l e .
leurs fens, par leur forme, par leur mouvement, beaucoup
plus de rapports avec les chofes qui les environnent, que
n’en ont les végétaux; ceux-ci par leur développement, par
leur figure, par leur accroiffement & par leurs différentes
parties ont aufiî un plus grand nombre de rapports avec
les objets extérieurs, que n’en ont les minéraux ou les
pierres, qui n’ont aucune forte de vie ou de mouvement,
& c ’eft par ce plus grand nombre de rapports que l’animal
eft réellement au defflis du végétal, & le végétal au deffïis
du minéral. ^Nous-mêmes, à ne confidérer que la partie
matérielle de notre etre , nouT^e'lommes au deffûs des
animaux que par quelques rapports de plus, tels que ceux
que nous donnent la langue & la main ; & quoique les
ouvrages du Créateur foient en eux-mêmes tous également
parfaits , l’animal eft, félon notre façon d’apercevoir,
l ’ouvrage le plus complet de la Nature, & l ’homme en
eft le chef-d’oeuvre.
En effet, que de reflorts, que de forces, que de machines
& de mouvemens font renfermez dans cette petite
-partie de matière qui compofe le corps d’un animal ! que
de rapports, que d’harmonie, que de correfpondance entre
les parties ! combien de combinaifons , d’arrangemens,
de caufes, d’effets, de principes, qui tous concourent au
même but, & que nous ne connoiflons que par des réful-
tats fi difficiles à comprendre, qu’ils n’ont cefle d’être
des merveilles que par l’habitude que nous avons prife
de n’y point réfléchir 1
Cependant, quelqu’admirable que cet ouvrage nous
paroiffè, ce n’eft pas dans l’individu qu’eft la plus grande
merveille, c ’eft dans lafucceftion, dans le renouvellement
& dans la durée des efpèces que la Nature jparoît tout-à-fait
inconcevable. Cette faculté de produire fon femblable,
qui réfide dans les animaux & dans les végétaux, cette
efpèce d’unité toujours fubfiftante & qui paraît éternelle,
cette vertu procréatrice qui s’exerce perpétuellement fans
fe détruire jamais, eft pour nous un myftère dont il femble
qu’il né nous eft pas permis de fonder la profondeur.
Car la matière inanimée , cette pierre, cette argille qui
eftfous nos pieds, a bien quelques propriétés, fon exiftence
feule en fuppofe un très-grand nombre, & la matière la
moins organifée ne laifle pas que d’avoir, en vertu de fon
exiftence, une infinité de rapports avec toutes les autres
parties de l ’Univers. Nous ne dirons pas, avec quelques
Philofophes, que la matière, fous quelque forme qu’elle
foit, connoîtfon exiftence & fes facultés relatives; cette
opinion tient à une queftion de Métaphyfique que nous
ne nous propofons pas de traiter ici, il nous fuffira de faire
fentir que n’ayant pas nous-mêmes la connoiflance de tôuW
les rapports que nous pouvons avoir avec les objets exté-1
rieurs, nous ne devons pas douter que la matière inanimée
n’ait infiniment moins de cette connoiflance, & que d’ailleurs
nos fenfations ne reflemblant en aucune façon aux
objets qui les caufent, nous devons conclurre par analogie
que la matière inanimée n’a ni fentiment, ni fenfâtion, ni
confcience d’exiftence, & que de lui attribuer quelques-
unes de ces facultés, ce ferait lui donner celle de penfer,
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