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vacille, on conclud qu’il refpirë encore; mais fouvent ces
effets arrivent par d’autres caufes, lors même que le malade
eft mort en effet, & quelquefois ils n’arrivent pas, quoiqu’il
foit encore vivant ; ces moyens font donc très-équivoques
: on irrite les narines par des Aernutatoircs, des liqueurs
pénétrantes, on cherche à réveiller les organes du
taél par des piqûres, des brûlures, &c. on donne des lave-
mens de fumée, on agite les membres par des mou vemens
violens, on fatigue l’oreille par des fons aigus & des. cris,
on fcarifie les omoplates, le dedans des mains & la plante
des pieds, on y applique des fers rouges, de la cire d’Ef-
pagne brûlante, &c. lorfqu’on veut être bien convaincu de
la certitude de la mort de quelqu’un ; mais il y a des cas ou
toutes ces épreuves font inutiles , & on a des exemples,
fur-tout de perfonnes cataleptiques, qui les ayant fubies
fans donner aucun ligne de vie , font enfliite revenues
d’elles-mêmes, au grand étonnement des fpe&ateurs.
Rien ne prouve mieux combien un certain état de vie
reffemble à l ’état de la mort, rien auffi ne feroit plus rai-
fonnable & plus félon l’humanité, que de fe preffer moins
qu’on ne fait d’abandonner, d’enfevelir & d’enterrer les
corps ; pourquoi n’attendre que dix , vin gt, oû vingt-
quatre heures, puifque ce temps ne fuffit pas pour diftin-
guer une mort vraie d’une mort apparente, & qu’on a des
exemples de perfonnes qui font forties de leur tombeau
au bout de deux ou trois jours ! pourquoi laiffer avec indifférence
précipiter les funérailles des perfonnes mêmes
dont nous aurions ardemment defiré de prolonger la vie î
pourquoi cet ufage, au changement duquel tous les hommes
font également intéreffez, fubfifte-t-il î ne fuffit-il
pas qu’il y ait eu quelquefois de l’abus par les enterre-
mens précipitez , pour nous engager à les différer & à
fuivre les avis des fages Médecins, qui nous difent * « qu’il
eft inconteftable que le corps eft quelquefois tellement «
privé de toute fonétion vitale , & que le fouffle de vie y «
efl: quelquefois tellement caché , qu’il ne paroît en rien «
différent de celui d’un mort; que la charité & la religion «
veulent qu’on détermine un temps fuffiifant pour attendre «
que la vie puiffe, fi elle fubfifte encore, fe manifefterpar «
des Agnes , qnautrement on s’expofe à devenir homi- «
eide en enterrant des'perfonnes vivantes : or, difent-ils, «
c ’eft ce qui peut arriver, fi l’on en croit la plus grande par- «
tie des auteurs , dans l’efpace de trois jours naturels ou «
de foixante-douze heures ; mais fi pendant ce temps il ne «
paroît aucun figne de vie , & qu’au contraire les corps «
exhalent une odeur cadavéreufe, on a une preuve infaiili- «
ble de la mort, & on peut les enterrer fans fcrupule. »
Nous parlerons ailleurs des ufages des différens peuples
au fujet des obsèques, des enterremens, des embaume-
mensv&c. la plûpart même de ceux qui font fauvages
font plus d’attention que nous- à ces derniers inftans, ils
regardent comme le premier devoir ce qui n’efl chez
nous qu’une cérémonie, ils refpeétent leurs morts, ils les
* Y oyez la DifTertation de M. Winliow far l’incertitude des figues
de la Mort, page 84, où ces paroles font rapportées d’aprèsTeriili,
qu’il appelle l’Efculape Vénitien.
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