Après deux ou trois mois, lorfque l ’enfant a acquis
des forces, on commence à lui donner une nourriture
un peu plus folide ; on fait cuire de la farine avec du
la it , c ’eft une forte de pain qui difpofe peu à peu fon
eflomac à recevoir le pain ordinaire & les autres alimens
dont il doit fe nourrir dans la fuite.
Pour parvenir à l’ufage des alimens folides on.augmente
peu à peu la confiftance des alimens liquides ,
ainli après avoir nourri 1’enfànt avec de la farine délayée
& cuite dans du lait, on lui donne du pain trempé dans
une liqueur convenable. Les enfans dans la première
année de leur âge font incapables de broyer les alimens ;
les dents leur manquent, ils n’en ont encore que le germe
enveloppé dans des gencives fi molles , que leur foible
réfiftance ne ferait aucun effet fur des matières folides.
On voit certaines nourrices, fur-tout dans le bas peuple,
qui mâchent des alimens pour les faire avaler enfuite à
leurs enfans : avant que de réfléchir fur cette pratique,
écartons toute idée de dégoût, & foyons perfuadez qu’à
cet âge les enfans ne peuvent en avoir aucune imprefïïon ;
en effet ils ne font pas moins avides de recevoir leur
nourriture de la bouche de la nourrice, que de fes mamelles
; au contraire il femble que la Nature même ait
introduit cet ufage dans plufieurs pays fort éloignez les
uns des autres, il efl en Italie, en Turquie & dans pref-
que toute l’A fie , on le retrouve en Amérique, dans les
Antilles, au Canada, &c. Je le crois fort utile aux enfans,
& très - convenable à leur état, c ’efl le feul moyen de
fournir
fournir à leur eflomac toute la fàlive qui efl néceflàire
pour la digeftion des alimens folides : fi la nourrice mâche
du pain , fa falive le détrempe & en fait une nourriture
bien meilleure que s’il étoit détrempé avec toute
autre liqueur ; cependant cette précaution ne peut être
neceffaire que jufqu’à ce qu’ils puiffent faire ufage de
leurs dents, broyer les alimens & les détremper de leur
propre falive.
Les dents que l ’on appelle incijïves, font au nombre de
huit, quatre au devant de chaque mâchoire ; leurs germes
fe développent ordinairement les premiers, communément
ce n’eft pas plutôt qu’à l’âge de fept mois, fouvent
à celui de huit ou dix mois, & d’autres fois à la fin de la
première année; ce développement efl quelquefois très-
prématuré ; on voit affez fouvent des enfans naître avec
des dents affez grandes pour déchirer le fein de leurs
nourrices: on a auffi trouvé des dents bien formées dans
des foetus long - temps avant le terme ordinaire de la.
naiffance.
. L e germe des dents efl d’abord contenu dans l’alvéole
& recouvert par la gencive, en croiffant il pouffe des
racines au fond de l ’alvéole, & il s’étend du côté de la
gencive. L e corps de la dent preffe peu à peu contre
cette membrane , & la diftend au point de la rompre 8c
de la déchirer pour paffer au travers ; cette opération ,
quoique naturelle , ne fuit pas les loix ordinaires de la
Nature, qui agit à tout inflant dans le corps humain fans y
caufer la moindre douleur,& même fans exciter aucune
Tome II. N n n