Prefque tous les animaux, à l ’exception de l ’homme,
ont chaque année des temps marquez pour la génération ;
le printemps eft pour les oifeaux la faifon de leurs amours,
celle du frai des carpes & de plufieurs autres efpèces de
poiffons, eft le temps de la plus grande chaleur de l’année,
comme aux mois de juin & d ’août ; celle du frai des
brochets, des barbeaux & d’autres efpèces de poiflons, eft
au printemps ; les chats fe cherchent au mois de janvier, au
mois de mai & au mois de feptembre, les chevreuils au
mois de décembre , les loups & les renards en janvier ,
les chevaux en été, les cerfs aux mois de feptembre &
d’octobre ; prefque tous les infeétes ne fe joignent qu’en
automne, &c. Les uns, comme ces derniers, femblent
s’épuifer totalement par l ’aéte de la génération, & en
effet, ils meurent peu de temps après, comme l ’on voit
mourir au bout de quelques jours les papillons qui produisent
les vers à foie ; d’autres ne s’épuifent pas jufqu’à
l ’extinétion de la vie, mais ils deviennent, comme les cerfs,
d’une maigreur extrême & d’une grande foibleffe, & il
leur faut un temps confidérable pour réparer la perte qu’ils
ont faite de leur fubftance organique ; d’autres s’épuifent
encore moins , & font en état d’engendrer plus fouvent;
d’autres enfin, comme l’homme, ne s’épuifent point du
tout, ou du moins font en état de réparer promptement
la perte qu’ils ont faite, & ils font auffi en tout temps en
état d’engendrer, cela dépend uniquement de la conftitu-
tionparticulière des organes de ces animaux: les grandes
limites que la Nature a mifes dans la manière d ’exifter, fe
trouvent toutes auffi étendues dans la manière de prendre
& de digérer la nourriture, dans les moyens de la rendre
ou de la garder, dans ceux de la féparer & d’en tirer les
molécules organiques néceffaires à la reproduction ; & partout
nous trouverons toûjours que tout ce qui peut être, eft.
On doit dire la même chofe du temps de la génération
des femelles ; les unes, comme les jumens, portent le
foetus pendant onze à douze mois ; d’autres, comme les
femmes, les vaches , les biches, pendant neuf mois ;
d’autres, comme les renards, les louves, pendant cinq
mois ; les chiennes pendant neuf femaines , les chattes
pendant fix , les lapins trente - un jours ; la plûpart des
oifeaux fortent de l ’oeuf au bout de*vingt-un jours; quelques
uns, comme les ferins, éclofent au bout de treize ou
quatorze jours, &c. la variété eft ici toute auffi grande
qu’en toute autre chofè, feulement il paroît que les plus
gros animaux qui ne produifent qu’un petit nombre de
foetus, font ceux qui portent le plus long - temps ; ce qui
confirme encore ce que nous avons dit, que la quantité de
nourriture organique eft à proportion moindre dans les
gros que dans les petits animaux, car c ’eft du fuperfîu de la
nourriture de la mère, quele foetus tire celle qui eft nécef-
faire à fon accroiffement & au développement de toutes
fes parties ; & puifque ce développement demande beaucoup
plus de temps dans les gros animaux que dans les
petits, c ’eft une preuve que la quantité de matière qui y
contribue, n’eft pas auffi abondante dans les premiers que
dans les derniers.