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que, fuivan-t- eux, l’énergie initiale de la poudre
feroit équivalente à dix mille-atmofphères; d’autres
la croient encore bien plus grande, & le
comte de Rumfort a prétendu prouver qu’au
moment de l’explofion, la force de la poudre
vaut plus de cinquante mille fois l'a preffian
moyenne de ratrapfphère. Ou lira fans doute
avec intérêt quelques détails fur la manière
dont ce favant eft parvenu à cet étonnant réfui tat.
Ils font extraits du compte rendu des expériences
qu’il lit à Munich en iqÿz , fa r la fome de la
poudre à canon, dans la Bibliothèque. hritanr-
nique y io®. volume.
L’appareil fervant,aux. expériences,, étoit ordonné
comme il fuit : un petit canon de fer forgé,
placé verticalement, étoit porté par un fupport
de fonte, lequel repofoit lui-même: fur une rondelle
de fer forgé j le, tout établi fur un bloc de
pierre. L’orilice du canon étoit. recouvert d’un
hénufphèré d’acier trempé , convexe en defïiis,
débordant l’orifice de tous cotés. L’ame du petit
canon étoit d’abord .cylindrique, & terminée en
bas par une efpèce d’appendice conique fort
étroit & fermé, préfentant eu dehors une efpèce
de queue deftinée à entrer dans un orifice de
même dimenfion, pratiqué dans un boulet qu’on
faifoit rougir & qu’on mettoit en place pour allumer
la poudre à l’intérieur par l’effet delà chaleur
tranfmife au travers dm métal. Entre l ’hémif-
phère & la charge de poudre, étoit mife une rondelle
de cuir fort r imprégnée de fuif & chaflee
avec force j.l’hémifphère étoit preffé contre l ’ori-
lice par le poids d’une pièce de 24 placée verticalement
, & retenue dans cette pofition par unécha-
faudage particulier.
La manière générale de procéder étoit celle-ci :
on employoit de la poudre de chalfe de la meilleure
qualité, d’un grain très-fin, foigneufenient
deffécliée , & toujours tenue dans un lieu fort
lec. Toutes les charges étoient pefées exaclementj
lès expériences étoient faites en plein air, avec la
note météorologique du temps de l’expérience.
€>n apportoit toujours la plus grande attention à
placer, l’axe du petit canon dans la même verticale
que-le centre de gravité du poids comprimant,
qui pou voit être augmenté par l’addition
de boulets mis dans l’ame de la pièce. Lorfqu’on
appliquoit le boulet rouge fous le petit canon.,,
l’explofion ne lardoit pas à s’enfuivre.
Le petit canon, dont il importe de connoître
les dimenfions, & qui fat le fécond de ceux qu’on
mil en expérience, avoit o met- 086 (2 pouc...
9 hg. ) de longueur extérieure , autant de diamètre
extérieur, mais l’ame n’àvoit que O mèt. 0064
( 3 lig.) , c’elt-à-dire, environ Jagroffeur d’une
plume d’oie ; là longueur de famé avoit o mèt.
©3 i8 ( 1 pouc. 3 lig. ) , on cinq fois le diamètre
de l’ame. L’hémifphère étoit chargé de la pièce
de 24, pefant 3670 kilog. (8000 liv .) environ.
Une première expérience faite avec- 0 kil. og53>
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( 10grains) de poudre, l’ame entière pouvant en-
contenir o kil. 00149 (28 grains), donna pour
réfultat un petit bruit femblable à celui de la^
calfure d’un.tube de verre, annonce de la détonation
intérieure-, qui échauffa conGdérablement
le petit canon. Le poids comprimant ne fut pas
même.ébranlé^ après cinq ou fix minutes ou fou-
leva le canon, & le fluide ékftique retenu juf-
qu’alors, s’échappa, en fifïlant tout au plus comme
l’explofion ordinaire d’un coup de fufil à vent.
; Après nombre d!épreuves, où la charge fat variée.,
on fe décida, à mettre dans l'éprouvelle
o kilog. OOi38 ( 26 grains) (-^ de pouce cube
environ) de poudre, moins qu’il n’en faudroit
pour un petit piftolet de poche , ou à peine un
dixième, de la; charge d’un moufquet. A l’expic—
fion, l’éprouvette éclata, avec un bruit épouvantable,
en deux morceaux lancés en direêHons contraires.
« Les afliflans, dit le comte de Rumfort,
» qui Uvoient jugé prefque puérile la précaution
» pr.ife dans les précédentes expériences, pour
» maîtrifer une fi petite quantité de poudre, pâ-?
» firent de frayeur à celle-ci. »
Paffons à la mefure delà force qui a produit
cette rupture. Quand il eft queftion de l’adhéfion
abfolue, on fait que les poids qui-chargent des
fubftances à peu près- inflexibles, font enlr’eux
comme les furfaces de rupture. On fait de plus, ;
par les expériences du même comte de Rumfort,
que 5o kil. 464 (119 liv .) font fuflifans pour
rompre un cylindre de i>on fer forgé donnant ~ —E
de pouce carré de furface de rupture. Ainfi il faut
pour une furface d’un pouce carré de feélion tranf-
verfale, 28834 kilog. ( 63466 liv. ). Or, la furface
de rupture du petit canon fût trouvée de 4194 millimètres
carrés (6 pouc. ~ carrés). Si ce fer étoit;
égal en ténacité à celui dont on vient de parler,,
la force qui a fait caffer l’éprouvette 'a . été de -
187420 kil (4i2529>liv. ). Si on compare la force
déployée dans ce cas, avec lapreffion de l’atmof-
phère , on réfléchira que la furface d’une des fec-
tions de l’ame de l’éprouvette s’eft trouvée précifé-6
ment de 323 millimètres ( f pouce carré); que l’at-
mofphère exerce fur 646 millimétrés (1 pouc. carré)
une preffion moyenne de 6 kil. 814 (15 liv.); &
! par conféquent de 3 kil. 407 (7*liv. 8 onc.) fur - de I
pouce Carré : or, fi-.on divife 412,629 liv. par 7 liv.
8;onc.., on aura 55oo4 ponr quotient, c’eft-à-dire
qu’il a fallu contre les parois deFamé-, un effort égal
à 55oo4 fois la preffion de. l’atmofphère pour produire
cette rupture.
On peut voir dans l’ouvrage cité, les détails
relatifs à la fuite de ces expériences ,1a loi analytique
par laquelle le comte de Rumfort prétend
fier léurs réfui ta ts , la caufe qu’il leur affio-ne, &c.
Nous ferons-feulement ohferver en paflant, qu’il
eft à regretter qu’en évaluant la force qui a pu
brifer en éclats fon éprouvette , le comte de-
Rumfort n’ait pas pu ou n’ait pas voulu faire entrer.
en coufidération la haute température à
'laquelle fans 'dont« -fe tronvojt-Wpi-oiwetlé au
moment deTexplafion. Quoi qu’il eiv foit, la force
•abfolue ‘de . la poudre eft prodigieule , & on
doit s’empreffer de prévenir une conféquence
qui femble naître bien naturellement de cette
vérité, mais qui cependant feroit mal -fondée.
Comment, dira-t-on, fi la force de la poudre
eft fi énergique , fe vfait-il que les armes d’ulage ,
qui n’ont jamais au-delà d’un calibre d’épaififeur à
la culaffe, réfiftent cependant au tir de plufieurs
centaines de coups ? Il faut bien diftinguer la 'dé*
tonation qui fe paffe dans une capacité inva-
•riable ne préfentant aucune iffue, de la détona-
•tion qui a beu dans un efpace variable, qui cède
dans une partie de fafurface, fous l’application
< d’une force aflèz foible; le premier cas eft celui
des expériences dil comte de Rumlort ; le1 fécond
eft celui des armes à feu. La grande diflerence
..entre ces deux cas, dérive principalement de la
non-inftantanéité de l'inflammation de la poudie.
Kn effet, quoi qu’en ait pu dire Robins, qui a tait
de rinftantanéité de l’inflammation, la baie de la
théorie, il eft de fait que la poudre s’enflamme
fucceffivement, & la propofition eft , vraie, non-
'fieulement pour un amas de poudre, mais encore
pour chaque grain en particulier. Far conféquent,
dans l’arme à feu où le pvojéüile très-mobile elt
le feul obftacle qui s’oppole à l’agrandmement
de la capacité qui renferme le fluide, fi celui-ci
eft produit fucceffivement par parties, on conçoit
très-bien que la première partie feuie exerce ton
énergie fur les parois de la capacité primitive
de la charge ; la fécondé partie agiffant dans celte
capacité accrue par l’eflèt de la première partie
far le proje&ile, la troifième partie agiflant dans
une capacité- plus grande encore, & ainfi de fuite,
-tandis que dans l’éprouvette du comie de Rumfort
, les allions, quoique fucCefïives, des diüe-
îièntes portions de fluide, finiffent par fe réunir
toutes contre le même obftacle^:
On ne connoît point les lois de rmflammabi-
fité de la poudre ; la durée del’explofion complète
d’une charge donnée dépend de la forme de la
charge , delà forme des grains , de leur arrangement
intérieur quand ils font déformés diverfes,
du chapitre icr, pour triompher de toutes les difficultés
de la denfité du grain, foit à la furface, fort dans
Ton intérieur, de la prélènce ou de l’abfence de
Thumidité, de la manière dont eft pratiquée lap-
plication du feu, &c. &c., d’où il fuit qu il eft j
extrêmement difficile de foumettre la force de la j
poudre au calcul,, dans l’hypothèfe de l’inflamma- j
tion fucceffive, & par conïéquent d’attaquer a
priori les importans problèmes de la vitene com- J
muniquée par une charge donnée, de la plus forte j
charge dans un tube donné, C’eft dans le |
Commentaire d’Euler, fur les nouveaux Principes |
artillerie, qu’il faut aller chercher ce qu’on a
pu faire de mieux en ce genre. On ne verra pas |
iiins admiration les efforts que ce favant fait fur- j
tout dansfes remarques fa r la onzième propofition 1
de la matière,; mais il y a dans ces recherches
trop d’hypothèfes, trop de confiantes a déterminer
par l’expérience pour que 1 artillerie
pratique puiffe en retirer quelqu’ utilité. ^ Quant
aux formules de viteffe initiale , déduites à priori
dans l’hypothèlè de l’inftantanéité de l’inflamma-r
lion, par Robins & autres , comme elles font
bafées fur le développement fubit, d’après la loi
de Mariotte, d’un fluide condenfé, on voit qu elles
ne peuvent fervir rigoureufemenl qu’à donner la
viteffe initiale des projectiles dans les carabines a
vent & antres armes femblables.
On confuitera encore, fi l’on veut, fur la détermination
à priori des viteffes initiales, quelques
ouvrages récens, tels que : la nouvelle Expérience
pour découvrir la force de la poudre & la quantité
d'air quelle renferme , parMaffey ,Vienne, 1800;
le Mouvement igné > conjîdéré principalement
dans la •charge d’une pièce d’artillene -, par
M. Fey ve v G ênes, 1811 , & l’EjJaïfar les effets de
la poudre dans les armes à f e u , par M. Cazeaux ,
chef de bat alllon d’artillerie, Taris ,1818.
2°. Rechèichc‘ des viteffès initiales parles portées.
Oh peut calculer la viteffe initiale d un projectile
d’après les eirconfiahces de ce qu’on peut
appeler fa portée verticale. Si on a pu mefurer
l’efpace de la montée d’un prèjeCtile, ce qui ne
paroît pas .impraticable, eu égavd aux fecours
qu’on peut tirer de certains appareils convenables
pour obferver la bauteuv à laquelle le projeClile
réfte un inftant ftationnaire ; fi, de plus, on a pu
mefurer le temps dje l’afcenfion, on obtiendra la
viteffe initiale par les formules de Newton, pour
déterminer les eirconftanees du mouvement dans
la verticale, & cela de deux manières, par le
temps feul & par la haùtéur feule à laquelle le pro-
jeÔile eft parvenu. Ces deux déterminations fe
vér e nt mutuellement. On peut aufii parvenir
à la viteffe inïtiale , fi on a pu obferver 1’ihtervalle
de temps entre le départ du projeCtilë & l’inftant
ou il frappe le fol en retombant , c eft—à—dire , la
fomme des temps de l’afcenfion & de la^ chute
confécutives ; ce qui difpenfe de connoître la
hauteur à laquelle le projeaile s’eft élevé. Cette
méthode des portées verticales a été propofée &•
j pratiquée par Daniel BevnouilU. { f f oy. fon Tîydro-
■ dinamique, Strasbourg, 1738.) Comme les formules
dont il faut faire ulage iuppofent que 1 air
eft uniformément denfe dans toute la hauteur que k
le projeaile a parcourue, & que la réfiftance de
ce milieu fuit la loi que Newton a trouvée la plus
probable , les réfullats ne peuvent être plus
exempts d’inGërtitude que les deux, élémens de
calcul dont il s’agit; c’el} affez dire qu’ils ne peuvent
être pleinement fatisfailans, car l’hypolhefe
d’une denfité uniforme s’écartera d’autant plus de
la vérité, que le projeaile fè fera éleve plus haut,
c’èft-à-dire, d’autant plus qu’il aura reçu une
plus grande viteffe initiale, & c’eft précifément