P R E U V E S
D E LA
T H E O R I E D E L A T E R R E .
A R T I C L E I I I .
Du Syjleme de M. Burnet.
Thomas Burnet. Telluris Theoria facra, orbis nofln originem &
mutationes generales quas aut jam fubiit, aul olim Jiibiturus e f,
compleilens. Londini, i 6 81.
Cet auteur efl le premier qui ait traité cette matière
généralement 8c d’une manière fÿflématique ; il
avoit beaucoup d’efprit & étoit homme de belles lettres:
Ion ouvrage a eu une grande réputation, & il a été critiqué
par quelque fçavans, entr’autres par M. Keill, qui
épluchant cette matière en Géomètre, a démontré les
erreurs de Burnet dans un traité qui a pour titre, Examination
o f the Theory o f the Earth. London, iy y^f, a e edit.
Ce même M. Keill a auffi réfuté le fÿftème de Whifton,
mais il traite ce dernier auteur bien différemment du
premier, il femble même qu’il efl de fon avis dans plu-
fieurs cas, & il regarde comrhe une chofe fort probable
le déluge caufé par la queue d’une comète. Mais pour
revenir à Burnet, fon livre efl élégamment écrit, il fçait
peindre & préfenter avec force de grandes images, &
mettre fous les yeux des fcènes magnifiques. Son plan
efl vafle, mais l’exécution manque faute de moyens, fon
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raifonnement efl petit, fes preuves font foibles, & fa
confiance efl fi grande qu’il la fait perdre à fon leéleur.
Il commence par nous dire qu’avant le déluge la terre
avoit une forme très-différente de celle que nous lui voyons
aujourd’hui. C ’étoit d’abord une maffe fluide, un cahos
compofé de matières de toutes efpèces 8c de toutes fortes
de figures ; les plus pelantes defcendirent vers le centre
8c formèrent au milieu du globe un corps dur & folide,
autour duquel les eaux plus légères fe raffemblèrent &
enveloppèrent de tous côtés le globe intérieur; l’air 8c
toutes les liqueurs plus légères que l’eau la furmontèrent
8c l’enveloppèrent auffi dans toute la circonférence : ainfi
entre l’orbe de l’air & celui de l’eau, il fe forma un orbe
d ’huile 8c de liqueur gralfe plus légères que l’eau ; mais
comme l’air étoit encore fort impur & qu’il contenoit
;une très-grande quantité de petites particules de matière
terreflre, peu à peu ces particules defcendirent, tombèrent
fur la couche d’huile, 8c formèrent un orbe terreflre
mêlé de limon 8c d’huile, & ce fut-là la première terre
habitable 8c le premier féjour de l’homme. C ’étoit un
. excellent terrein, une terre légère, greffe, & faite exprès
pour fe prêter à la foibleffe des premiers germes. La fur-
face du globe terreflre étoit donc dans ces premiers temps
égale, uniforme, continue, fans montagnes, fans mers
8c fans inégalités ; mais la terre ne demeura qu’environ
feize fiècles dans cet état, car la chaleur du foleil deffé-
chant peu à peu cette croûte fimoneufe, la fit fendre d’abord
à la furface, bien-tôt ces fentes pénétrèrent plus avant