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profondeur. II me paraît que le poids de l’eau pourrait en
être la caufe auffi-bien que le froid, fi on deicendoit a une
grande profondeur, comme trois ou quatre cens brades;
mais à la vérité les plongeurs ne defcendent jamais a plus
de cent pieds ou environ. Le même auteur rapporte que
dans un voyage aux Indes orientales, au delà de la ligne,
à environ 3 5 degrés de latitude fud, on laiffa tomber une
fonde à quatre cens brades de profondeur, & qu’ayant
retiré cette fonde, quiétoit de plomb & qui pefon environ
30 à 3 5 livres, elle étoit devenue fi froide, qu’il fem-
bloit toucher un morceau de glace. On fçait auffi que les
voyageurs, pour rafraîchir leur vin, defcendent les bouteilles
à plufieurs brades de profondeur dans la mer , &
plus on les defcend, plus le vin eft frais. ^
Tous ces faits pourraient faire préfumer que I eau de
la mer eft plus falée au fond qu’à la furface; cependant on
a des témoignages contraires, fondez fur des expériences
qu’on a faites pour tirer dans des vafes, qu’on ne debou-
choit qu’à une certaine profondeur1, de l’eau de la mer,
laquelle ne s’eft pas trouvée plus falée que celle de la fur-
face; il y a même des endroits où l’eau de la furface étant
falée, l’eau du fond fe trouve douce, & cela doit arriver
dans’tous les lieux où il y a des fontaines & des fources
qui fortent au fond delà mer, comme auprès de Goa, a
Ormuz, & même dans la mer de Naples, où il y a des
fources chaudes dans le fond.
Il y a d’autres endroits où l’on a remarqué des fources
bitumineufes & des couches de bitume au fond de la mer,
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& fur la terre il y a une grande quantité de ces fources,
qui portent le bitume mêlé avec l’eau dans la mer. A la
Barbade il y a une fource de bitume pur qui coule des
rochers jufqu’à la mer ; le fel & le bitume font donc les
matières dominantes dans l’eau de la mer, mais elle eft
encore mêlée de beaucoup d’autres matières; carie goût
de l’eau n’eft pas le même dans toutes les parties de l’o-
cean, d ailleurs l’agitation: & la chaleur du foleil altèrent
le goût naturel que devrait avoir l’eau de la mer, & les
couleurs différentes des différentes mers , & des mêmes
mers en différens temps, prouvent que l’eau de la mer
contient des matières de bien des elpèces , foit qu’elle les
détaché de fon propre fond, foit qu’elles y foient amenées
par les fleuves.
Prefque tous, les pays arrofez par de grands fleuves font
fujets à des inondations périodiques, fur-tout les pays bas
& voifins de leur embouchure, & les. fleuves qui tirent
leurs fources de fort loin , font ceux qui débordent le plus
regulierement. Tout le monde a entendu:parier des inondations
du Nil, il conferve dans un grand efpace, & fort
loin dans la mer, la douceur & la blancheur de fes eaux.
Strabon & les autres anciens auteurs ont écrit qu’il avoit
fept embouchures, mais aujourd’hui il n’enrefte que deux
qui foient navigables ;;il y aun troifième canal qui defcend
à Alexandrie pour remplir les citernes, & un quatrième
canal qui eft encore plus petit; comme on a négligé depuis
fort long temps de nettoyer les canaux, ils' fe font
comblez : les anciens employoient à ce travail un grand
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