quatorzième fiècle, & actuellement encore le grec corrompu
par les idiomes étrangers ne diffère pas autant du
grec ancien, que l’italien diffère du latin. Cette langue,
qu’on doit regarder comme la plus parfaite & la plus
abondante de toutes, étoit dès le temps d’Homère portée
à un grand point de perfeétion, ce qui ftippofe
néceffaireinent une ancienneté confidérable avant le
fiècle même de ce grand Poète:; car l’on pourrait efti-
mcr l’ancienneté on la nouveauté d’une langue par la
quantité plus ou moins grande des mots, & la variété
plus ou moins nuancée des eonftruétions : or nous
avons dans cette langue les noms d’une très-grande
quantité de choies qui n’ont aucun nom en latin ou en
françois, les animaux les plus rares , certaines efpèces
d ’oifeaux ou de poiffons, ou de minéraux qn’on ne
•rencontre que très - difficilement, très-rarement, ont
•des noms & des noms conffans dans cette langue ;
preuve évidente que ces objets de l’Hiftoire Naturelle
étoient connus, & que les Grecs non feulement les
connoiffoient , mais même qu’ils en avoient une idée
précife, qu’ils ne pouvoient avoir acquife que par une
étude de ces mêmes objets , étude qui ftippofe néceflai-
■rement des obfèrvations & des remarques : ils ont même
des noms pour les variétés, & ce que nous ne pouvons
repréfenter que par une phrafe, fe nomme dans cette
langue par un feul fubftantif. Cette abondance de mots,
cette richefle d’expreffions nettes & précifes ne fuppofent-
t-elles pas la même,abondance d’idées &de connoiffancesl
Ne voit- on pas que des gens qui avoient nommé beaucoup
plus de chofes que nous, en connoiffoient par
conféquent beaucoup plus ! & cependant ils n’avoient
pas fait, comme nous, des méthodes & des arrangemens
arbitraires ; ils penfoient que la vraie fcience eft la con^
noiffance des faits, que pour l’acquérir il falloit fe fami-
liarifer avec les produélions de la Nature, donner des
noms à toutes, afin de les faire reconnoître, de pouvoir
s’en entretenir, de fe repréfenter plus fouvent les idées
des chofes rares & fingulières, & de multiplier ainfi des
connoiflànces qui fans cela fe feraient peut-être évanouies,
rien n’étant plus fujet à l’oubli que ce qui n’a
point de nom. Tout ce qui n’eft pas d’un ufage commun
ne fe foûtient que par le fecours des repréfentations.
D ’ailleurs les Anciens qui ont écrit fur l’Hiftoire
Naturelle étoient de grands hommes, & qui ne s’étoient
pas bornez à cette feule étude; ils avoient l’elprit élevé,
des connoiflànces variées, approfondies, & des vues générales
, & s’il nous paroît au premier coup d’oeil qu’il leur
manquât un peu d’exactitude dans de certains détails,
il eft aifé de reconnoître, en les lifant avec réflexion,
qu’ils ne penfoient pas que les petites chofes méritaflent
Une attention auffi grande que celle qu’on leur a donnée
dans ces derniers temps; & quelque reproche que les
Modernespuiffent faire aux Anciens, il me paroît qu’A-
riftote, Theophrafte & Pline qui ont été les premiers
Naturaliftes, font auffi les plus grands à certains égards.
L hiftoire des animaux d’Ariftote eft peut-être encore
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