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l’orient de la nouvelle Zemble, mais qu’étant de retour
la Compagnie des Indes qui avoit intérêt que ce partage
ne fût pas découvert, empêcha ces Navigateurs de retourner.
Voyez le Recueil des voyages dunord, pag. 200. Mais
la Compagnie des Indes de Hollande crut au contraire
qu’il étoit de fon intérêt de trouver ce partage ; l’ayant
tenté inutilement du côté de l’Europe, elle le fit chercher
du côté du Japon , St elle auroit apparemment réulfi,
fi l’Empereur du Japon n’eût pas interdit aux étrangers
toute navigation du côté des terres de Jeflo. Ce partage
ne peut donc fe trouver qu’en allant droit au pôle au-
delà de Spitzherg, ou bien en luivant le milieu de la
haute mer, entre la nouvelle Zemble & Spitzberg, fous
le 79 degré de latitude : fi cette mer a une largeur con-
fidérable, on ne doit pas craindre de la trouver glacée à
Cette latitude, & pas même fous le pôle, par les raifons
que nous avons alléguées; en effet, il n’y apas d’exemple
qu’on ait trouvé la furfàce de la mer glacée au large
St à une diftance confidérable des côtes, le feul exemple
d’une mer totalement glacée eft celui de la mer noire,
elle eft étroite & peu fàlée,- & elle reçoit une très-grande
quantité de fleuves qui viennent des terres feptentrionales
St qui y apportent des glaces, aufli elle gèle quelquefois
au point que fà fùrface eft entièrement glacée , même
à une profondeur confidérable, St, fi on en croit les
hiftoriens,elle gela du temps de l’Empereur Copronyme,
de trente coudées d’épaiffeur, fans compter vingt coudées
de neige qu’il y avoit par deflus la glace : ce fait me
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paraît exagéré, mais il eft sûr quelle gèle prcfque tous
les hivers, tandis que les hautes mers qui font de mille
lieues plus près du pôle, ne gèlent pas; ce qui ne peut
venir que de la différence de la fafûre St du peu de glaces
qu’elles reçoivent par les fleuves, en comparaifon de
la quantité énorme de glaçons qu’ils tranfportent dans la
mer noire.
Ces glaces, que l’on regarde comme des barrières qui
s oppofent à la navigation vers les pôles & à la découverte
des terres auftrales, prouvent feulement qu’il y a de
très-grands fleuves dans le voifinage des climats où on
les a rencontrées, par confcquent elles nous indiquent
auftî qu’il y a de vaftes continens d’où ces fleuves tirent
leur origine, St on ne doit pas fe décourager à la vûe de
ces obftacles ; car, fi l’on y fait attention, l’on reconnoîtra
aifement que ces glaces ne doivent être que dans de
certains endroits particuliers, qu’il eft prefqu’impoftîble
que dans le cercle entier que nous pouvons imaginer
terminer les terres auftrales du côté de l’équateur, il y ait
par-tout de grands fleuves qui charient des glaces , St que
par conféquent il y a grande- apparence qu’on réüffiroit
en dirigeant fa route vers quelqu’autre point de ce cercle.
D ’ailleurs la defeription que nous ont donnée Dampier
St quelques autres voyageurs, du terrein de la nouvelle
Hollande, nous peut faire foupçonner que cette partie
du globe qui avoifme les terres auftrales, St qui peut-être
en fait partie, eft un pays moins ancien que te refte de ce
continent inconnu. La nouvelle Hollande eft une terre
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